La promotion de l’anglais

Nous aimerions, en tant qu’organisme populaire impliqué pour l’avancement de la société, vous faire quelques commentaires concernant votre campagne de promotion de l’anglais. La Société St-Jean Baptiste de Montréal (SSJBM) œuvre depuis 1834 à la promotion du peuple québécois, de son histoire et de notre langue commune, le français. Nous constituons le legs permanent que les Patriotes de 1837 ont laissé à l’Amérique française. La section Pierre-Le-Gardeur, quant à elle, a été fondée en 1963. La SSJBM a initié la fête nationale du 24 juin, le Monument national, les HEC, la Chambre de commerce de Montréal, les premières caisses d’épargne, le premier mouvement féministe francophone, les premières écoles de théâtre, de technique et des Beaux-Arts.

Nous avons observé que plusieurs écoles organisent maintenant des activités faisant la promotion de l’anglais. Nous tenons tout d’abord à faire une distinction entre l’éducation et la promotion qui sont deux choses bien différentes. Qu’un professeur tienne des initiatives en classe pour améliorer l’apprentissage de sa matière est une chose. Qu’une école organise la promotion de l’anglais en est une autre.

Première ironie de la chose, cette promotion se déroule en avril, juste le mois suivant mars, mois de promotion mondiale de la francophonie. Est-ce une façon de banaliser cette dernière, de la rendre inefficace? Ou de s’en moquer? Peut-on mettre, en Amérique du Nord, les deux langues sur un même pied? Elles ne le sont pas! Peut-on douter de la force d’attraction naturelle de l’anglais sur les jeunes? N’écoutent-ils pas déjà presque exclusivement de la musique anglophone? L’absurde de la chose se constate avec une activité comme le « T-shirt day ». Vous suggérez aux élèves de porter toute une journée un chandail arborant une inscription anglaise. Vraiment? Il y a un défi là-dedans? C’est comme si on leur demandait de fouiller une botte de foin pour y trouver une brindille au lieu de l’aiguille. Ils n’ont sans doute QUE des chandails à consonance anglophone dans leur penderie.

Et si, au moins, on accordait déjà la même importance aux deux langues. Le français demeure fragile et parfois même dévalorisé. On organise des classes d’anglais intensif en 6e année, mais penserait-on seulement à tenir une cinquième année de français intensif? Juste pour nous assurer de rehausser l’apprentissage de la langue commune avant d’envoyer les enfants vers une autre langue.

Chez beaucoup de nouveaux arrivants, le problème n’est pas l’anglais, mais bien la connaissance du français. Il ne suffit pas de baragouiner une langue pour s’intégrer à une société, il faut aussi la vivre. Les enfants dans nos écoles francophones parlent tous français. On peut cependant se poser des questions sur la qualité et la variété du vocabulaire, mais le véritable défi est de connaître leur langue de consommation culturelle. Plusieurs n’écoutent jamais la télé ou la radio francophone. Ils parlent français, mais consomment exclusivement en anglais.

Finalement, on perd le sens de ce qu’est vraiment la promotion. On promeut une cause, toujours celle des plus faibles. Il y a deux journées des travailleurs dans l’année, mais nous viendrait-il à l’esprit d’en avoir une pour les patrons millionnaires? Faire la promotion de l’anglais est aussi absurde. Rassurez-vous la langue de Shakespeare ne cesse de progresser et n’a aucunement besoin qu’on la pousse davantage. Le français, par contre, oui!

Jocelyn Jalette,
Président de la section PLG de la SSJBM