Le ressort visible

Josée Legault  | Journal de Montréal

 

Selon un vieil adage anglais, rien ne permet de mieux rassembler ses esprits que la perspective d’être pendu à l’aube. Voilà qui résume à merveille le congrès du Parti québécois et le vote de con­fiance de 92,8 % accordé à son chef Jean-François Lisée.

Devancé par la CAQ et coincé à 22 % dans les sondages, le PQ s’est donné le seul mot d’ordre possible à un an d’une élection décisive : serrer les rangs. Au congrès, l’objectif était surtout d’éviter toute confrontation avec le chef. Question de s’assurer d’un vote de confiance fort. Question aussi de ne pas se chicaner devant la visite médiatique.

Pour ce faire, des « compromis » sur des sujets sensibles avaient été concoctés à l’avance, dont celui sur les cégeps. Le chef étant opposé à l’application de la loi 101 au niveau collégial, le « compromis » trouvé frôle toutefois l’absurde.

 

Contradiction

Favorables au libre choix de la langue d’enseignement au cégep, les péquistes proposent de permettre à des francophones et des allophones de faire une session dans un cégep anglophone.

Cela fournirait au réseau anglophone une nouvelle clientèle lucrative pendant que les cégeps francophones peinent à remplir leurs classes. Du même souffle, le PQ s’engage à réduire graduellement le financement des cégeps anglophones pour l’aligner « sur le poids démographique » de la communauté anglo-québécoise. La contradiction est ahurissante.

Il faut dire que le Québec souffre d’amnésie. On oublie que le but de la loi 101 est de consolider le français comme langue commune et non pas d’élever l’anglais au statut d’obsession nationale au moment même où le taux élevé de bilinguisme des jeunes francophones fracasse déjà des records.

Ces mesures loufoques visent à court-circuiter tout désaccord entre le chef et sa base. L’application pourtant nécessaire de la loi 101 aux cégeps étant rejetée par de nombreux francophones, le PQ cherche aussi à ne pas s’aliéner ceux qui votent encore pour lui.

 

« Solide »

Dans ma chronique de vendredi, j’avançais que sans le « ciment » de la souveraineté, la seule carte restante du PQ est de s’armer d’un programme « solide comme le roc », cohérent et humaniste.

Sauf pour les cégeps et une laïcité aux contours indéfinis, c’est en effet ce qui ressort du congrès. La nouvelle maxi­me préélectorale du PQ – « Un plan solide. Zéro slogan » – en confirme l’intention.

Face au gâchis des réformes du ministre Gaétan Barrette, c’est sur la santé et les services sociaux que le « plan » du PQ est le plus travaillé et le plus prometteur. En campagne électorale, c’est une arme à ne pas dédaigner.

Un « plan solide » ne lui vaudra pas de miracles, mais il lui permettrait de mieux se mesurer à la CAQ. Encore faudra-t-il que le chef péquiste trouve enfin le chemin de la constance. Comme disait Jacques Parizeau de son ancien conseil­ler, M. Lisée n’a jamais rencontré un virage qu’il n’a pas voulu prendre. Il serait temps de remiser ce mauvais réflexe.

 

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