Qui sont les radicaux ? – Réplique à la chronique d’Alain Dubuc

QUI SONT LES RADICAUX ?
Par Mario Beaulieu

En réaction à la tournée récente de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal en Italie et en France, dans son édition de mercredi dernier, La Presse reprochait à la SSJB d’avoir participé à la Fête de l’Humanité.

La Fête de l’Humanité est le rendez-vous annuel de tous les progressistes français, mais aussi de leurs amis d’outre-frontière. Plus de 500 000 personnes ont participé à cet événement encore cette année dont plusieurs personnalités telles que Ségolène Royal, présidente du Parti socialiste français, Jean-Luc Mélenchon du Front de gauche, ou encore des artistes tels que Avril Lavigne, Joan Baez, Yannick Noah, Bernard Lavillier, etc. Plusieurs artistes québécois y ont donné des spectacles dans le passé tels que Félix Leclerc, Gilles Vigneault et Robert Charlebois.

C’est précisément pour tenter de contrer le genre de désinformation propagée ici par La Presse, que la SSJB de Montréal participe à des événements internationaux, tels que la Fête de l’Humanité à Paris ou le Festival des peuples minoritaires en Italie. Les médias fédéralistes et anglophones propagent un portrait jovialiste de la situation du français au Québec et présentent ceux qui militent pour le rétablissement de la Charte de la langue française ou son renforcement comme des extrémistes ou des marginaux.

La Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal entend utiliser toutes les tribunes à sa disposition pour contrer cette propagande qui est aussi néfaste pour l’image du Québec à l’international, que pour les débats sur la langue française à l’intérieur de notre territoire.

Au cours des années, des médias ont laissé libre cours à toutes les insultes à notre égard : nous traitant d’intégristes, d’anglophobes, d’orthodoxes, etc. En fait, ceux qui profèrent ces injures à l’égard des défenseurs du français et des indépendantistes, montrent bien de quel côté se trouvent les véritables radicaux.

Mais toutes ces tentatives visant à nous museler et nous marginaliser n’ont pas empêché le débat linguistique de prendre sa place et l’appui à l’indépendance de se maintenir. Le déclin du français ne peut-être caché indéfiniment.

Le gouvernement du Canada s’ingère plus que jamais dans la législation linguistique québécoise. Citons à titre d’exemple, le jugement de la Cour suprême affaiblissant la Charte de la langue française en 2010, la répression contre le français dans les services fédéraux et le surfinancement gouvernemental des institutions anglophones.

Dans l’ensemble du territoire nord-américain, les francophones ne représentent qu’environ 2 % d’une population qui compte 335 millions d’anglophones dans le reste du Canada et aux États-Unis. Pendant plus d’un siècle et jusque dans les années 60, toutes les provinces canadiennes aujourd’hui majoritairement anglophones ont adopté ou maintenu des lois interdisant l’enseignement en français, même comme langue seconde, dans les écoles publiques. Par la suite, les politiques de bilinguisme officiel du gouvernement fédéral se sont avérées n’être qu’une chimère puisqu’elles ont résulté en une accélération de l’assimilation des francophones. Au Canada, en dehors du Québec, il ne reste plus que 4,5 % de citoyens de langue maternelle française. La moitié d’entre eux ne parle plus français à la maison. À Montréal, métropole québécoise où se joue l’avenir du français en Amérique, la proportion de francophones est tombée sous les 50 %.

La SSJB de Montréal compte faire le vrai débat partout au Québec et à l’international. Il faut diffuser le constat de la situation linguistique réelle et faire le vrai débat de fond avec tous les citoyens. L’établissement d’une véritable langue commune est, avant tout, un facteur essentiel d’inclusion de tous les citoyens et de cohésion sociale. Le principe du droit fondamental des peuples à assurer la survie et l’épanouissement de leur langue et de leur culture est accepté par l’ensemble des Québécoises et Québécois, peu importe leurs allégeances politiques, leur origine ou leur langue. Cela correspond au droit à la diversité culturelle dans le cadre de la mondialisation.

Et justement, la diversité culturelle interpelle les humanistes et la communauté internationale. Quoi de mieux que de saisir l’occasion de la Fête de l’Humanité et du Festival des peuples minoritaires pour faire valoir l’enjeu crucial de la langue au Québec.

Mario Beaulieu
Président de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal
Le 22 septembre 2011