Une année horrible pour les souverainistes

Lettre d’opinion de Caroline Sarah Saint-Laurent – Historienne et étudiante au doctorat en sociologie, Saint-Donat-de-Rimouski publié dans Le Devoir le 19 décembre 2011

Au Canada anglais, le Québec est une province ne nécessitant aucun statut particulier et les francophones ne constituent qu’une minorité parmi d’autres. Cette conception trouve son expression notamment dans le multiculturalisme et la Charte canadienne des droits. What does Quebec want? À 23 %, la «réserve française» n’est même plus une préoccupation pour le ROC et ses hauts fonctionnaires unilingues. Trente ans sans adhérer à la Constitution du pays et nul sentiment d’urgence. Autant de coups de force ou de simples ingérences dans notre vie collective qui ne justifient pas qu’on s’oublie.

Soit dit en passant, la question nationale n’appartient pas seulement aux Montréalais. André Laurendeau, par exemple, le savait et évitait la condescendance à l’égard des régions. Il y a une vie intellectuelle progressiste hors du conservatisme identitaire élitiste de certains intolérants. Leur attitude centralise et isole le mouvement national, car les principes de la liberté, les droits de l’homme, la nature et l’objet d’un gouvernement occupent tous les esprits et se discutent jusque dans le village le plus reculé de notre Québec immense. Fernand Dumont ne disait-il pas, en 1991, «la première condition pour une décentralisation véritable n’est pas d’abord de l’ordre de l’organisation ou de l’administration; elle relève de la culture»?

Mauvaise nouvelle pour le Québec français, les trois circonscriptions créées dans la couronne de Montréal ne seront jamais aussi francophones que Lotbinière, Kamouraska-Témiscouata et Matane. Le coup fatal porté à notre nationalité en région pourrait bien venir de ces jeunes issus de la classe moyenne qui partent en autobus étudier à l’extérieur en souhaitant au retour parler un anglais sans accent, c’est-à-dire sans québécitude. La suprématie anglo-saxonne impressionne toujours les moutons atteints de fatigue culturelle. Où sont les Indignés de la langue?


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