Professeur, avocat, chef du Parti québécois et premier ministre du Québec de 2001 à 2003, Bernard Landry a consacré sa vie politique à la cause souverainiste. Il est décédé mardi matin à l’âge de 81 ans. Sa santé s’était détériorée ces derniers mois, en raison d’une maladie pulmonaire.
Des funérailles d’État auront lieu prochainement, a annoncé l’actuel premier ministre François Legault.
Les hommages ont abondé après l’annonce de son décès, en milieu d’après-midi, alors que le drapeau fleurdelisé était mis en berne à l’Assemblée nationale.
Fougueux et passionné, il n’a jamais vraiment quitté la scène politique, même après son fracassant départ de la vie politique en juin 2005.Comme chef du Parti québécois, il avait obtenu un vote de confiance de 76,2 %. Fâché et humilié, il a claqué la porte sur le coup, geste qu’il a dit plus tard regretter.
Né en 1937 à Saint-Jacques, dans Lanaudière, Bernard Landry étudie le droit à Montréal et l’économie à Paris.
Jeune et brillant, il a toujours eu la politique dans le sang. Il a 27 ans quand René Lévesque, alors ministre des Richesses naturelles du gouvernement libéral de Jean Lesage, le recrute au sein de son cabinet. M. Landry tentera deux fois de se faire élire après avoir suivi René Lévesque au Parti québécois, sans succès.
Il remporte finalement la circonscription de Fabre en 1976, lorsque le Parti québécois prend le pouvoir. Il accède au cabinet à titre de ministre d’État au Développement économique. Au début des années 80, il occupera divers postes ministériels d’importance, dont ceux du Commerce extérieur, des Relations internationales et des Finances.
Il est élu en 1981 dans Laval-des-Rapides. En 1985, il se porte candidat à la direction du Parti québécois et abandonne la course avant la fin, faute d’appuis. Quelques mois plus tard, lui et son parti sont défaits aux élections générales.
Il enseigne ensuite les sciences de la gestion à l’UQAM pendant quelques années. Il n’abandonne pas la politique pour autant, puisqu’il assure la vice-présidence du PQ de 1989 à 1994. Il est élu dans Verchères en 1994, et y sera réélu en 1998 et 2003. Il occupe des postes importants dans le cabinet de Jacques Parizeau, dont ceux de vice-premier ministre et de ministre des Affaires internationales.
Lucien Bouchard fait ensuite de lui un ministre ultrapuissant. Il le nomme, entre autres, vice-premier ministre (1996-2001), ministre des Finances (1996-2001), du Revenu (1996-1999), ainsi que de l’Industrie et du Commerce (1998-2001). C’est grâce à Bernard Landry que le Québec atteint le déficit zéro.
En 1999, sa femme, Lorraine Laporte, meurt d’un cancer à l’âge de 57 ans. Bouleversé, il redouble d’ardeur au travail.
Enfin premier ministre
Quand Lucien Bouchard démissionne en 2001, le grand jour est finalement venu pour Bernard Landry. Il prend sa place et est couronné chef du Parti québécois, devenant du même coup premier ministre du Québec.
Il signe la paix des braves, une importante entente avec les Cris sur le développement de la Baie-James. Il fait aussi fait adopter une loi anti-pauvreté.
Mais Bernard Landry hérite d’un gouvernement dont la cote de popularité est à son plus bas. Il lutte contre le mécontentement à l’égard des fusions municipales forcées et des compressions dans le secteur de la santé.
En 2003, il déclenche des élections générales. Malgré une campagne vigoureuse dans les rangs péquistes, ce sont les libéraux de Jean Charest qui prennent le pouvoir. Bernard Landry n’aura donc jamais été élu premier ministre au moyen d’un scrutin populaire. Il sera chef de l’opposition officielle jusqu’en 2005.
Un leadership menacé
Bernard Landry a toujours voulu faire sa marque. Parce qu’il ne veut pas laisser le parti aux mains de Pauline Marois ou de François Legault, il décide de rester, engageant son parti dans une profonde remise en question.
Entre-temps, la diffusion d’un documentaire tourné durant la campagne électorale – À hauteur d’homme, de Jean-Claude Labrecque – lui a attiré un peu de sympathie. Le documentaire le rend plus humain et le public découvre celle qui deviendra sa deuxième femme, Chantal Renaud. Elle l’accompagnait partout.
En 2004, dans la foulée de la victoire des libéraux, le leadership du chef péquiste est menacé. Pauline Marois, alors députée de Taillon, réclame ouvertement une course à la direction. Un défi qui passera par un vote de confiance, que Bernard Landry estimera avoir perdu. Ces événements ont marqué le début de la fin de sa carrière politique.
Bernard Landry est ensuite retourné enseigner les sciences de la gestion à l’UQAM. Il a aussi été chercheur associé à la Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l’UQAM et conseiller stratégique auprès de la firme d’avocats Lapointe Rosenstein de Montréal.
Sa passion pour la politique est demeurée vive. Dans ses dernières années, il commentera souvent dans les médias les décisions de ses successeurs. Il restera jusqu’à la fin un fervent militant souverainiste.
Cet homme de grande culture a reçu de nombreuses distinctions au cours de sa longue carrière. Parmi celles-ci : Grand-Croix de l’Ordre de la Pléiade (2002), commandeur de la Légion d’honneur de France (2004), premier prix Louis-Joseph-Papineau pour avoir consacré une bonne partie de sa vie à la cause souverainiste (2005) et grand officier de l’Ordre national du Québec pour sa contribution exceptionnelle à la vie québécoise (2008).