La SSJB exhorte le Ministre Proulx de modifier son projet de loi 144

C O M M U N I Q U É

 

 

L’école-passerelle à la maison

La SSJB exhorte le Ministre Proulx de modifier son projet de loi 144

 

Port-au-Prince, 9 octobre 2017 – La Société Saint-Jean-Baptiste (SSJB), par la voix de son Président général Maxime Laporte, condamne fermement l’intention du Ministre de l’Éducation, monsieur Sébastien Proulx, de soustraire du système scolaire francophone de nombreux élèves québécois bénéficiant de l’école à la maison.

Depuis Haïti où il mène une mission internationale initiée par la SSJB, Me Laporte a fait valoir : « Comment un gouvernement du Québec peut-il perdre de vue le caractère essentiel des mesures de la Charte de la langue française (loi 101) relatives à la langue d’enseignement ? »

« Comment peut-on ainsi se ficher de la nécessité absolue de ces dispositions eu égard à l’avenir du français au Québec, sachant qu’il en va de notre cohésion sociale, de même que de la francisation, de l’intégration et de l’inclusion de nos concitoyens allophones ? »

« C’est ahurissant ! Le gouvernement du Québec doit retrouver ses esprits, et vite ! Le projet de loi 144 doit impérativement être modifié, comme l’exigent à juste titre tous les partis d’opposition », s’est exclamé monsieur Laporte.

 

Rappels historiques : les Libéraux plus aplaventris que jamais !

Le Président général a tenu à rappeler qu’« en 2002, par l’adoption unanime de la loi 104, nos élus à l’Assemblée nationale, y compris les Libéraux, ont voulu mettre fin au phénomène anglicisant des écoles-passerelles. Souvenons-nous qu’à l’époque, un stratagème permettait aux parents québécois d’acheter le droit de faire passer leurs enfants du système scolaire francophone au réseau public anglais, cela par le détour des écoles privées non-subventionnées. En 2009, la Cour suprême du Canada déclarait invalides les dispositions centrales de la loi 104, suscitant un important mouvement de protestation populaire, orchestré notamment par la SSJB avec le concours des grandes centrales syndicales. Un an plus tard, en 2010, le gouvernement libéral de Jean Charest, refusant comme toujours de tenir tête à Ottawa sur le front constitutionnel, a patenté une réponse législative tout juste assez molle pour satisfaire aux diktats fédéraux… La résultante : une passerelle légèrement plus étroite, mais toujours bien en place ! »

« Jusque-là, tout de même, les Libéraux n’avaient jamais fait preuve d’une insouciance telle que celle se dégageant aujourd’hui des propos du Ministre Proulx en ce qui a trait au dossier précis de la langue d’enseignement, – encore que pour le reste, le bulletin du PLQ en matière linguistique depuis 2003 affiche manifestement un E-, pour « échec lamentable »… », a poursuivi monsieur Laporte.

« Plus aplaventris que jamais, et sans même s’appuyer cette fois sur la complicité toujours utile des tribunaux canadiens, notre gouvernement censément national propose, de son propre chef, une nouvelle brèche dans la loi 101 : l’école-passerelle à la maison ! », a déploré le jeune activiste.

Plus encore, « la proposition du ministre Proulx, contenue à l’article 2 de son projet de loi, constitue donc un recul d’autant plus navrant qu’il est sans précédent. – Du moins depuis l’époque du Bill 63 où moult anglomanes, aveuglés par l’efficace idéologique de la notion de « libre-choix » quant à la langue d’enseignement, refusaient d’admettre les incidences lourdement préjudiciables et amplement démontrées de cet individualisme linguistique sur la vitalité du français au Québec, responsabilité collective par nature… Hélas, il semble aujourd’hui que l’histoire se répète. »

 

 

Quelques réponses aux objections du Ministre et de ses supporters

 

« C’est déjà dans la pratique et la loi 101 initiale ne prévoyait rien à cet égard », affirme le Ministre Proulx. 

« Il y a une marge entre le fait de constater l’existence d’une telle pratique, et sa cristallisation dans une loi. Ce n’est pas parce que cela est, que cela doit être. L’appel au statu quo n’est que le symptôme d’un manque flagrant de courage et de sens du devoir à l’égard de notre langue commune. L’adoption de la loi 144 est l’occasion pour corriger le tir », a argué Maxime Laporte.

« Par ailleurs, il est clair que la loi 101, dès le départ, avait pour objet de mettre fin à l’hémorragie permettant à des non-anglophones d’accéder aux institutions de la population historique d’expression anglaise. Certes, grâce à la loi 101, ces institutions seraient désormais protégées, mais réservées exclusivement à ceux et celles dont au moins un parent a étudié dans la langue de Shakespeare au Québec. Or, il n’y aucune raison de croire que ce qui vaut pour les élèves tenus de fréquenter les écoles publiques francophones, ne vaudrait plus pour ceux qui poursuivent un parcours à la maison. Rien ne justifie que ces derniers puissent bénéficier des services publics d’éducation primaire ou secondaire, destinés à la minorité anglophone. S’agisse-t-il uniquement de services « d’accompagnement », comme le prétend le Ministre, il reste que des fonds publics y sont investis, lesquels sont censés servir exclusivement la minorité anglophone, dans son intérêt, et non favoriser l’anglicisation des allophones », a indiqué le Président général.

 

« L’école à la maison pourra se faire dans la langue souhaitée par les parents et l’État n’a pas à légiférer sur ce qui se passe dans les foyers », soutiennent certains.

« L’argument est fallacieux. Il est faux d’affirmer que l’école à la maison pourra se faire véritablement dans la langue voulue par les parents. Cela ne sera pas permis si la langue souhaitée s’avère l’espagnol, l’arabe, l’italien ou le japonais, par exemple… En revanche, cet interdit sera levé en faveur de l’anglais – et de l’anglais seulement. Cela, même si les parents ne répondent pas aux conditions qui, dans la Charte de la langue française, permettent à certains d’envoyer leurs enfants à l’école anglaise, pour des raisons liées à l’historique académique familial. »

« Ainsi, dans une pure logique de type « dualité linguistique canadienne » à la Trudeau, 1) on confère un avantage net à l’anglais, omettant sciemment que plus de 200 langues sont parlées dans les chaumières du Québec, y compris les langues autochtones. 2) On érode le principe fondamental du français, seule langue commune et officielle, censé agir comme le liant qui amène les locuteurs de toutes les langues à se parler et à se comprendre dans ce Québec du 21e siècle, à la fois singulier et pluriel. »

« Ensuite, en vertu de quel principe l’État devrait-il abandonner ses prérogatives en matière d’instruction publique ? Sous prétexte que certains parents enseignent à leurs jeunes à la maison, ceux-ci devraient-ils échapper aux lois qui régissent le bien commun ? Si l’on va au bout de la logique du Ministre, devrait-on bénéficier d’une immunité lorsqu’on pose des actes illicites, du simple fait qu’ils ont lieu dans le confort de son salon ? Allons donc. L’enseignement, peu importe où il se donne, y compris la langue d’enseignement, est une affaire de société, une affaire d’État », note monsieur Laporte.

 

 

« Certains parents sont incapables d’enseigner le français », observent des tenants du libre-choix.

« Si tel était le problème, il faudrait en conclure, ab absurdo, que le projet de loi présume de cette incapacité à l’égard de tous les parents enseignant à la maison, y compris les francophones eux-mêmes ! Pour quelques personnes n’ayant pas les compétences suffisantes en français, la solution consisterait donc à permettre à tout un chacun de s’affilier à une Commission scolaire anglophone ? Autrement dit, qui ne maîtrise pas le français serait nécessairement expert en anglais ! Drôle de raisonnement. »

« D’autre part, cet argument ne semble curieusement pas avoir été retenu dans le cas de l’incapacité à enseigner toute autre matière, comme l’histoire, la géographie, les mathématiques… Encore là, on confère à l’anglais un statut spécial, comme s’il s’agissait de la seule matière véritablement importante à l’école… Et on relègue le français, langue commune au Québec, – doit-on le répéter, à un statut de langue seconde. C’est grave quand on y pense. »

 

« Ces élèves n’auront pas accès au réseau public anglophone », assure le gouvernement.

Monsieur Laporte a rétorqué : « Voilà qui est fort présomptueux ! Je suis prêt à parier 101 piastres que les tribunaux canadiens donneront éventuellement tort au Ministre ! En 2002, le gouvernement québécois était bien sûr de son coup en faisant adopter la loi 104 contre les écoles-passerelles, mais la Cour suprême du Canada en a jugé autrement, invoquant des considérations comme « l’authenticité du parcours en anglais » et autres acrobaties d’interprétation des lois. Il y a fort à parier qu’une formation scolaire en anglais à la maison pourra éventuellement se qualifier en tant que « parcours authentique », ouvrant toutes grandes les portes du réseau public anglophone, cela non seulement pour chaque élève visé, mais aussi pour l’ensemble de ses frères et sœurs, puis tous leurs descendants, faut-il le rappeler. »

 

Conclusion

« Avec nos alliés, nous suivrons donc la situation de près et ferons tout en notre possible pour que le gouvernement Couillard favorise le libre-choix collectif du français, plutôt que le libre-choix individuel de l’anglicisation croissante du Québec », a conclu monsieur Laporte.

Fondée en 1834, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal est le plus ancien organisme citoyen voué à l’avancement du combat pour faire du français la seule langue commune au Québec. Par ailleurs, rappelons qu’en septembre dernier, la SSJB a fait parvenir une lettre de mise en demeure au gouvernement afin de le forcer à mettre en vigueur une autre disposition de la loi 104, – l’article premier, concernant les communications écrites de l’Administration avec les personnes morales, lesquelles devraient être rédigées en français uniquement, sous réserves de certaines exceptions et modalités d’application. Or, depuis 15 ans, l’Exécutif a négligé puis refusé publiquement d’ »exécuter » la tâche qui lui a été confiée par l’Assemblée nationale de fixer la date d’entrée en vigueur de cet important article. À ce jour, le gouvernement n’a fourni aucune réponse à la mise en demeure de la SSJB. Le délai de grâce prévu dans la lettre prendra fin le 1er janvier prochain, après quoi la Société entamera les procédures judiciaires qui s’imposent.

 

 

 

 

 

Renseignement et demandes d’entrevue (Maxime Laporte) :
Claude Boisvert, responsable des communications 438-931-2615,  cboisvert@ssjb.com