Une victoire du nationalisme

Gaston Bouffard | Le Nouvelliste

 

En cette année du 150e du Dominion (confédération), un sujet est passé sous le radar médiatique. Malgré une pétition de 10 000 noms et des rassemblements, les médias sont restés muets. C’est le procès de la Loi 99, passée en 2000, sous Lucien Bouchard. Le Québec se montrait alors digne et fier en se tenant debout face au zèle antidémocratique des Dion et Chrétien qui s’étaient déshonorés en faisant adopter l’inqualifiable loi C-20 sur la clarté référendaire, qui visait tout simplement à achever le peuple québécois.

Le 16 octobre 2013, aux côtés de l’ancien chef du Parti Égalité, Keith Henderson, le gouvernement canadien demande à des juges, nommés par lui, de neutraliser cette loi qui compte parmi les plus fondamentales jamais décrétées par le Parlement du Québec.

Cette loi 99, que le Canada ne peut tolérer, réitère que seul le peuple québécois est maître de son avenir et que la manière de se prononcer sur son avenir lui appartient en propre et que la règle pourtant classique et universelle, digne du fair play anglais, voulant qu’un référendum, ça se gagne à 50 % plus une voix. Le 23 octobre, l’Assemblée nationale réplique en adoptant une résolution unanime pour dénoncer cette ingérence dans la démocratie québécoise et réclame son retrait du dossier. Mais selon la coutume, la volonté du Québec n’est pas entendue et sa procureure générale participera au procès tenu du 20 au 27 mars 2017 en Cour supérieure à Montréal.

C’est alors que la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal qui, depuis 183 ans, agit comme chef de file du mouvement citoyen pour l’avancement de notre combat national, par la voix de son président général Me Maxime Laporte (qui plaidera bénévolement) décide d’intervenir, vu la faiblesse que fait valoir en défense le gouvernement du Québec.

Ce que plaide le Québec au soutien de la validité de sa propre Loi 99, c’est essentiellement qu’elle ne voudrait rien dire juridiquement, n’étant qu’un énoncé de principes déclaratoires et que le Canada n’aurait pas à s’inquiéter de sa validité constitutionnelle… Si l’Assemblée nationale avait préféré s’en tenir à des paroles, elle se serait contentée d’adopter une simple résolution, comme le souhaitait à l’époque le Parti libéral… Pour ce qui est des deux autres partis, le requérant Henderson plaide que la Loi 99 dirait des choses constitutionnellement excessives. «République par voie révolutionnaire» et demande son invalidation.

Quant à la position du Canada, la Loi 99 ne veut rien dire formellement en droit, ou bien ce qu’elle dit devra être jugé excessif. Pour la SSJB, il est faux de prétendre que la Loi 99 ne veut rien dire en droit, tout comme il est faux de lui faire dire des choses excessives qu’elle ne dit pas par ailleurs. On attendait les résultats de ce procès depuis novembre dernier et ce n’est que maintenant que la cour se prononce. Pourquoi cette longue attente? On ne saurait dire! Pour citer Josée Legault: «C’est un séisme politique, juridique et constitutionnel.»

Dans un jugement longuement attendu, la Cour supérieure valide la loi 99. Contrairement à la loi dite sur la clarté, la loi 99 affirme l’existence du peuple québécois, l’intégrité territoriale du Québec, la souveraineté de l’Assemblée nationale et le droit du Québec à l’autodétermination dans la règle du 50 % + un. […] L’ironie suprême du jugement est que le premier ministre du Canada est nul autre que Justin Trudeau, le fils de Pierre Elliott, l’adversaire le plus intransigeant des souverainistes et surtout, l’artisan fourbe du rapatriement de la constitution sans le consentement de l’Assemblée nationale. L’ironie est aussi dans le fait que le rapatriement niait l’existence même de la nation québécoise.»

Ce jugement répond à ma question du début. Oui, le peuple québécois a des droits et nous sommes reconnus comme peuple. Je suis d’accord avec Mme Legault qui ajoute que ce jugement marque l’histoire parce qu’il préserve l’avenir; la vraie victoire est celle de la démocratie et du Québec.

Une question demeure: les adversaires du Québec vont-ils accepter la décision de la Cour supérieure ou se lancer dans un autre long et coûteux débat, en faisant appel et en se rendant même à la Cour suprême? Pour le moment, réjouissons-nous de cette victoire du nationalisme en espérant que ça en réveillera plusieurs… dont la flamme est plutôt vacillante.

 

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