Après «La bataille de Londres», celle pour la vérité

FRÉDÉRIC BASTIEN | L’ACTUALITÉ | 19/10/2014

[Photo : PC/Ron Poling] Si les conservateurs veulent faire quelque chose de significatif pour promouvoir la connaissance historique, ils n’ont qu’à modifier la loi d’accès à l’information, notamment pour permettre aux historiens de faire leur travail.
[Photo : PC/Ron Poling] Si les conservateurs veulent faire quelque chose de significatif pour promouvoir la connaissance historique, ils n’ont qu’à modifier la loi d’accès à l’information, notamment pour permettre aux historiens de faire leur travail.

[…] Il y a eu cette année le centenaire du début de la Première Guerre mondiale et le 75e anniversaire du début de la Deuxième Guerre mondiale. L’an prochain, ce sera le bicentenaire de la naissance de sir John A. Macdonald, le 50e  anniversaire du drapeau national du Canada. En 2016, on aura notamment droit au 175e anniversaire de la naissance de sir Wilfrid Laurier, au 150e anniversaire des raids des fenians, au centenaire du droit de vote des femmes et au 75e anniversaire de la bataille de Hong Kong. Le tout culminera en 2017 avec le 150e anniversaire de la Confédération, le centenaire de la bataille de Vimy et de Passchendaele et d’autres encore.

[…] si les conservateurs veulent vraiment faire quelque chose de significatif pour promouvoir la connaissance historique, ils n’ont qu’à modifier la loi d’accès à l’information, notamment pour permettre aux historiens de faire leur travail.

Mentionnons ici que notre pays est l’un des pires au monde en matière d’accès à l’information, se classant derrière l’Angola, le Niger et la Colombie, selon le Centre pour la loi et la démocratie d’Halifax et Access Info, un organisme basé à Madrid. Concrètement, cela veut dire entre autres qu’il est très facile pour le gouvernement fédéral de ne pas divulguer des documents historiques pendant des siècles, et ce sans aucune autre forme de procès.

Un jour ou l’autre, tous les pays doivent faire face à leur passé, quel que soit celui-ci. En l’an 2000, alors qu’il était président, Bill Clinton a décidé de déclasser les archives sur le coup d’État de 1973 au Chili. Le général Augusto Pinochet s’était alors emparé du pouvoir par la force au détriment du président Salvador Allende. Une dictature cruelle avait alors renversé un gouvernement élu démocratiquement. Les milliers de documents rendus publics par l’administration Clinton ont démontré à quel point la CIA était intervenue en faveur de Pinochet. Voilà ce qui est arrivé. Les Américains doivent le savoir.

Si le gouvernement de M. Harper suivait ce dernier exemple, les Canadiens pourraient en apprendre davantage sur un épisode fondamental de notre histoire. Mon livre [La bataille de Londres] a suscité une enquête de la Cour suprême et de multiples commentaires. En ayant accès aux nombreux documents fédéraux toujours indisponibles, les historiens pourraient confirmer, infirmer ou nuancer mes propos. La recherche de la vérité pourrait ainsi se faire librement, sans que l’on doive livrer bataille pour l’obtenir.

Il est par ailleurs curieux d’entendre le premier ministre Philippe Couillard clamer haut et fort que lui-même et son gouvernement entendent participer pleinement aux commémorations du 150e anniversaire de la confédération. Comme les autres formations politiques québécoises, les libéraux souhaitent obtenir toute l’information sur le rapatriement constitutionnel. Devant la fin de non-recevoir d’Ottawa dans ce dossier, le gouvernement libéral devrait minimalement boycotter les commémorations de 2017 pour manifester son mécontentement. Il en va de la dignité du Québec et de ses intérêts.

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