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Histoires d’horreur chez les francos

Plusieurs situations ont été réglées grâce au Commissaire aux services en français, un poste qui sera aboli

Le Franco-Torontois Gilles Marchildon dénonce les mauvais services en français.

 

Philippe Orfali  | Journal de Montréal

 

TORONTO | Quand la Ville Reine a changé l’horaire de collecte de déchets, il y a deux ans, l’avis a été envoyé en anglais, en tamoul, en mandarin, en italien, en tagalog, en portugais et en espagnol. Mais pas en français.

« On a une politique qui dit que la Ville doit communiquer en français. Elle ne l’a pas fait. […] On ne fait pas face à de l’hostilité, on fait face à l’ignorance. Et c’est peut-être pire », lâche le Franco-Torontois Gilles Marchildon.

Des histoires comme celle-là, tous les Franco-Ontariens en ont vécu. Certaines sont anodines. D’autres donnent carrément froid dans le dos.

Alors que les compressions du gouvernement de Doug Ford dans les services en français déchaînent les passions chez nos voisins, Le Journal vous en rapporte quelques-unes.

 

« Il ne pourra plus s’attaquer aux problèmes systémiques, il pourra simplement traiter les plaintes, dit le commissaire en entrevue au Journal. Moi, je suis un protecteur, un promoteur, un rassembleur, en plus d’être ombudsman. »

Depuis la création du poste il y a plus de 12 ans, l’appareil gouvernemental a fait des pas de géant grâce à ses interventions, dit-il.

« Mais on a aussi et surtout aidé des gens pris dans le système. Que ce soit des enfants de 2 et 4 ans à qui un travailleur social s’adresse uniquement en anglais alors qu’ils ne parlent pas cette langue, ou des gens malades qui n’ont pas accès à des soins dans leur langue au moment où ils en ont le plus besoin. »

 

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DES EXEMPLES DE PLAINTES TRAITÉES PAR LE COMMISSAIRE

 

Incomprise à l’hôpital

La plaignante a eu une réaction­­­­ à un médicament et a dû être transportée d’urgence à l’Hôpital général de Kingston. Les ambulanciers parlent français, mais rendus à l’urgence, ça se corse. Cette infirmière retraitée présente des signes similaires à ceux d’un ACV. Elle comprenait ce que les infirmières lui disaient en anglais, mais n’arrivait pas à parler dans cette langue. Une des infirmières l’aurait ridiculisée en lui disant : « I know you can speak in English. We speak English here ». On l’aurait ensuite transférée de l’urgence au département de psychiatrie. Motif : agressivité, hystérie et non-conformité, parce qu’elle ne parlait que le français.


Placée dans une résidence anglophone à 97 ans

Dans le nord de l’Ontario, une dame prend soin au quotidien de sa belle-mère de 97 ans. Elle fait des démarches pour obtenir des services et des soins de base à domicile. Malgré les suivis, on envoie à plusieurs reprises du personnel anglophone. Selon la plaignante, la direction aurait même dit à son employé de ne pas s’en faire. Si la dame ne parle pas anglais, il n’a qu’à faire des charades avec elle ! On lui a offert une place dans un foyer francophone, mais à l’extérieur de la ville.

Entre-temps, la dame de 97 ans s’est fracturé une hanche. Elle s’est retrouvée dans une résidence où on ne parle qu’anglais.


Même les avocats

Alors qu’on s’inquiète souvent de l’accès à la justice en français, même les avocats rencontrent des embûches. « J’avais deux examens à passer pour être admis au Barreau. On m’a envoyé de la documentation en français. Sauf que les documents étaient truffés d’erreurs de traduction et de grammaire. Ils étaient de mauvaise qualité. Lors de mes examens [en français], certaines questions étaient difficiles à comprendre pour les mêmes raisons. On dirait que cet organisme qui promeut les droits bâcle les droits. On dirait que, pour eux, les vraies affaires se passent en anglais. Ils se disent que nous finirons bien par aller lire la version anglaise pour comprendre. »


Accès difficile à l’école française

Comme des centaines d’adolescentes de Toronto, les trois filles de Lianne ont eu à choisir entre conserver leur langue maternelle et poursuivre leurs études à une distance raisonnable de leur maison. Son aînée a fait son secondaire en français, mais elle a eu à traverser la ville de Toronto matin et soir pour se rendre à son école dépourvue de cafétéria et de cour de récréation. « Une école où, véritablement, les anglophones n’étudieraient pas », selon elle. La plus jeune a choisi l’école de langue anglaise du quartier, dotée de bien meilleures installations. Elle « a honte » de parler le français, soutient sa mère. « Ça me brise le cœur. »


Descente aux enfers d’une mère de famille

Julie découvre que son mari agresse sexuellement son fils. À la Société de l’aide à l’enfance (la DPJ ontarienne), on la met en contact avec une employée dont le français est incompréhensible. Elle se tourne aussi vers la police. Là encore, les employés chargés de s’occu­per d’elle et de son fils ne parlent qu’anglais, malgré ses demandes.

« Finalement, le jour de l’audience en cour arrive. L’avocat de l’aide à l’enfance ne parle que l’anglais. La travailleuse sociale aussi. Au moins, le juge parle français. Comme on me le recommande, je me trouve une avocate bilingue. Ce sera plus facile de procéder en anglais, selon elle. J’abdique et je choisis mes batailles : celle d’assurer la sécurité de mon fils, et non celle de ma langue ».

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