CHRISTIAN GAGNON – Société Saint-Jean-Baptiste – 25 avril 2014
Il y aura 165 ans, le 25 avril, Montréal était secouée par des événements d’une rare violence, alors que le Parlement du Canada-Uni était saccagé puis incendié par des émeutiers incités à commettre ces actes de sédition par la Montreal Gazette. «Ce même quotidien anglophone, si prompt à déterrer des déclarations hors de leur contexte pour accuser les souverainistes de xénophobie et d’intolérance – mais lorsqu’on étudie notre histoire, on se rend compte que c’est plutôt l’inverse – a toujours refusé de reconnaître ses torts dans ce triste épisode de notre histoire. The Gazette avait publié une édition spéciale appelant à la rébellion (Rebellion is the law of the Land) où elle évoquait la suprématie de la race anglo-saxonne (Anglo-Saxons! you must live for the future. Your blood and race will now be supreme, if true to yourselves).»
Rappelons qu’à la suite des Rébellions de 1837-1838, la répression menée par l’armée britannique avait été terrible, des villages entiers ayant été rasés. Lord Durham recommande alors l’union du Bas et du Haut-Canada pour minoriser les francophones. L’Acte d’Union est adopté en juillet 1840 et Montréal devient la capitale de la «Province of Canada» en 1843. En mars 1849, Louis-Hippolyte Lafontaine fait adopter l’«Acte pour indemniser les personnes dans le Bas-Canada, dont les propriétés ont été détruites durant la rébellion dans les années 1837 et 1838». Intolérants, les orangistes accusent Lafontaine de «récompenser les rebelles». Le 25 avril 1849, il ne manque plus que la sanction royale du gouverneur Elgin pour que la loi entre en vigueur.
En ce jour parmi les plus sombres de notre histoire, The Gazette avait joué un rôle aussi zélé que honteux dans la fanatisation des émeutiers venus exprimer leur colère au Parlement. Furieux que le gouvernement de Louis-Hippolyte Lafontaine ait fait adopter des dédommagements aux victimes de la dure répression de l’armée britannique, la Montreal Gazette publie une édition spéciale appelant la population anglaise de Montréal à se soulever. «Anglo-Saxons, vous devez vivre pour l’avenir ; votre sang et votre race seront désormais votre loi suprême, si vous êtes vrais à vous-mêmes. Vous serez Anglais, dussiez-vous n’être plus Britanniques. À qui et quelle est votre allégeance maintenant? Que chaque homme réponde pour lui-même […] La foule doit s’assembler sur la Place d’Armes, ce soir, à huit heures. Au combat, c’est le moment!», publie le quotidien anglophone.
Entre 1200 et 1500 fanatiques répondent à l’appel. De la Place d’Armes, des orateurs incitent la foule à se rendre au Parlement. Mettant les députés en fuite, les émeutiers saccagent et mettent le feu au bâtiment, qui sera entièrement décimé par les flammes. Quelque 25 000 volumes, remontant jusqu’au début de la colonie française, sont détruits. Le Parlement ne siégera plus jamais à Montréal. Quelques jours plus tard, une foule enragée incendie également la maison du Premier ministre Lafontaine qui, arraché des mains des émeutiers, sera sauvé de justesse. Jamais personne ne sera jugé pour ces actes criminels. Le Parlement siégeait à l’époque dans l’ancien immeuble du marché Sainte-Anne, sur le site de ce qui a été longtemps un terrain de stationnement, et qui fait maintenant l’objet d’importantes fouilles archéologiques en face du Centre d’histoire de Montréal, Place d’Youville. Aucun monument ni aucune plaque n’y évoque les odieux événements du 25 avril 1849, pour y perpétuer la mémoire de ce qui constitue un drame d’une rare ampleur.
VEUILLEZ NOTER – Ce texte est une adaptation d’un texte de Christian Gagnon paru en 2009.