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Joseph Bourret

par Jean-Pierre Durand

Joseph Bourret
Joseph Bourret

Cinquième président de la Société Saint- Jean-Baptiste de Montréal (1848-1849), Joseph Bourret naquit à Rivière-du-Loup le 10 juin 1802 et décéda à Montréal le 5 mars 1859, il y a donc 150 ans. Après son cours classique à Nicolet, Joseph Bourret s’installa à Montréal pour y apprendre le droit. Il fut admis au Barreau en 1823. Outre sa profession, il s’impliqua en politique, notamment aux côtés de Ludger Duvernay et de Louis-Hippolyte La Fontaine. Ce fut un nationaliste modéré, peut-être même un peu mou.

En 1843, après la défaite militaire des soulèvements de 1837-1838, le temps (mais sûrement aussi les emprisonnements, les exécutions et les exils) semblait avoir assagi les passions. Trois ans plus tôt, l’Acte d’Union avait réuni le Haut et le Bas-Canada sous un seul gouvernement, qui visait à rien de moins qu’assurer la prédominance de l’élément britannique. Et le haut clergé – qui pendant les Rébellions avait menacé les Patriotes d’excommunication et condamné d’avance toute forme de résistance – va occuper désormais une place prépondérante auprès de la société canadienne-française et, en corollaire, fournir une aide inestimable à l’ordre établi.

On choisit ce moment pour « réorganiser » l’Association Saint-Jean-Baptiste (qui était le nom pour désigner à l’époque la SSJB) en société de bienfaisance. Comme on veut rassurer le clergé et mettre fi n aux suspicions des autorités, les Duvernay, Viger et Cartier bcbg comme on dit aujourd’hui, qui ne sont pas trop associées aux anciens rebelles, pour poursuivre la tradition. Or, parmi ces gens on trouve Joseph Bourret, qui est le maire de Montréal (il le fut de 1842 à 1844 et de 1847 à 1849) et qui entretient de surcroît des relations étroites avec l’évêque Ignace Bourget, peu enclin à la désobéissance civile, et Antoine-Olivier Berthelet, un riche homme d’affaires qui avait voté contre les 92 Résolutions. Bref, la SSJB a décidé, sans doute pour faire oublier son passé né dans la tourmente, de se présenter sous des abords plus inoffensifs. L’objectif pourtant demeure inchangé : rassembler les Canadiens-français, entretenir leur patriotisme et développer leur esprit de solidarité. Tout n’est quand même pas perdu.

Certes, on l’a dit, Bourret est un modéré, mais pas un modéré fi ni pour autant. Il défend le principe du gouvernement responsable, d’où ses rapports étroits avec Louis-Hippolyte La Fontaine. Les deux se servent habilement d’ailleurs des principes parlementaires britanniques, dont ils tiennent à la stricte application, pour contourner les visées assimilatrices du régime en place. Ils  n’iront pas plus loin cependant, car le désir de réforme de La Fontaine, ancien partisan des Patriotes (mais qui s’était néanmoins opposé au recours aux armes en 1837), était fort modéré. Un historien prétendit qu’avec l’âge, La Fontaine devint de plus en plus conservateur… Alors, si vous voulez mon avis, évitons à l’avenir de vieillir trop vite !

Quant à la « réorganisation » de l’Association Saint-Jean-Baptiste, elle ramène la reprise de la Fête nationale du 24 juin, mais en lui conférant un caractère religieux qui manquait aux banquets tenus avant les Troubles. Une messe solennelle, avec distribution de pain bénit, et une procession. En d’autres mots, on ne portera plus de toast aux révolutionnaires irlandais comme au Banquet de 1834. Bien sûr, dans les séances de l’Association, on évoque encore la politique, puisque bon nombre s’en mêlent de toute façon. On se remémore aussi la période révolutionnaire, même si cela s’apparente davantage à une amicale des anciens qu’à un désir même inavoué de fourbir à nouveau ses armes. Les héros sont fatigués.

Pendant que la Société se réorganisait pour mieux paraître aux yeux de l’État colonial, nos adversaires anglo-saxons et orangistes, eux, n’avaient pas désarmé pour autant. À l’appel du journal The Montreal Gazette, et pour s’opposer à l’Acte pour indemniser les personnes dans le Bas-Canada dont les propriétés avaient été détruites durant les rébellions, quelque 1500 fanatiques anglo-saxons, le 25 avril 1849, saccagent et mettent à feu au Parlement, qui siégeait alors à Montréal. Je cherche dans les annales un Pierre Falardeau qui aurait alors pu réclamer vengeance, mais je n’en trouve pas.

En 1849, l’Association, qui a Joseph Bourret comme président, obtient sa charte, dans laquelle il est établi que son but est d’aider et secourir les personnes en cette province, d’origine française, soit du côté de leur père ou de leur mère, ou celles de toute autre origine, qui se sont mariées à des personnes françaises et se trouvent dans la nécessité de recourir à l’assistance de leurs concitoyens, par suite d’accidents ou d’autres malheurs qu’elles auraient éprouvés, ainsi que pour répandre l’éducation parmi elles, et contribuer à leur progrès moral et social, et pour d’autres objets de bienfaisance… Le sceau de l’Association portera la devise « Rendre le peuple meilleur ».

 

 

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