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La France renonce à elle-même

Simon-Pierre Savard-Tremblay | Journal de Montréal

 

 

La rencontre annuelle des chefs d’État à Davos, organisée par le Forum économique mondial (FEM), représente un moment par excellence de réseautage entre la classe politique globale et le milieu des affaires.

Les dirigeants s’expriment généralement dans la langue de leur nation. Or, le président français Emmanuel Macron a plutôt choisi de livrer la première partie de sa longue intervention en « globish », ou en anglais managérial.

Cette portion de son allocution était consacrée à vanter les réformes ayant eu lieu sous sa gouverne, comme la baisse de la fiscalité des entreprises et les investissements en « innovation ». Macron a aussi cité l’Allemagne en modèle pour la France. À n’en point douter, le message au monde des affaires réuni à Davos était limpide : venez investir chez nous.  La conception politique colportée par le macronisme est celle qu’embrassent le milieu des affaires et les puissances financières. Les orientations des organisations supranationales sont claires et limpides : une nation « compétitive » a pour mission d’attirer et de retenir un capital de plus en plus mobile. Que les États se le tiennent pour dit, s’ils n’offrent pas un environnement favorable aux investisseurs, ceux-ci s’envoleront rapidement vers des cieux plus cléments. C’est tout ce qui se cache derrière les promesses de modernisation et de tourner la page sur les « rigidités » françaises.

La volonté du président de tourner la page sur la spécificité française est sérieuse. En affirmant vouloir diriger la France comme une « start-up », soit comme une toute nouvelle créature entrepreneuriale, en arguant que sa culture nationale n’existe pas, le président ne laisse planer aucun doute sur ses allégeances. Le président français incarne comme nul autre cette volonté d’américaniser la France et d’en faire un pays néolibéral à part entière.

À Davos, il n’est donc pas surprenant que le président ait choisi l’anglais des affaires pour s’exprimer auprès de ceux qui possèdent le capital. Récemment, il s’était aussi adressé dans cette même langue auprès des députés… allemands. Le président de la France est pourtant le meneur symbolique de la francophonie dans le monde. Par conséquent, nous assistons à une triste démission devant les obligations linguistiques de la mondialisation.

 

 

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