La langue de la santé

Jean-Guy Plante | Le Devoir

 

Une proportion de 2,7 % de francophones hors Québec justifie le bilinguisme du réseau de santé au Québec. Piège pour banaliser notre particularité ? Doux somnifère pour masquer le rêve avorté d’un bilinguisme réel à la grandeur du pays ?

Voilà le Plan d’action pour les langues officielles. On tente de nous faire avaler cet état de fait en investissant plusieurs millions pour nous faire croire que des services en santé pourraient exister hors Québec. À part un hôpital de l’Ontario — arraché au tir au poignet — et un peu de service bilingue au Nouveau-Brunswick, les services en santé en français existent-ils vraiment au Canada ? Pourtant, des centaines de millions seront investies au pays dans ce plan d’action.

Le concept de « communautés de langue officielle en situation minoritaire » permet au gouvernement fédéral de saupoudrer des millions hors Québec tout en obligeant la société québécoise à assurer un service de santé de langue anglaise dans tous les coins reculés du Québec. De langue maternelle anglaise, selon le recensement de 2016, on compte 601 155 anglophones sur 8 066 560 Québécois, soit 7,4 %.

Ce projet d’angliciser le Québec existait déjà, mais on augmente encore le budget et on élargit les structures sur le terrain : réseau de santé anglophone partout au Québec (jusqu’au Lac-Saint-Jean) et 3,5 millions prévus pour ce projet.

Ce plan a des répercussions sur l’augmentation de postes bilingues au détriment de la langue commune du Québec. Cela semble faire partie d’un projet de la communauté anglophone du Québec d’augmenter leurs effectifs en invitant tous les nouveaux citoyens du Québec à utiliser davantage la langue anglaise. Puisque le libre choix existe, la pression est énorme pour les nouveaux arrivants qui comprendront rapidement que « no need to learn French ». C’est ce qui se passe de plus en plus dans la ville de Laval ces dernières années, là où une « communauté de langue officielle en situation minoritaire » augmente ses effectifs. Cette politique tentera d’infléchir la trajectoire linguistique vers le bilinguisme institutionnel néfaste pour le Québec. Si le bilinguisme individuel peut être une richesse, le bilinguisme institutionnel constitue un danger souvent mortel pour la langue qui s’avère la moins prestigieuse.

Enfin, au prorata de la population, nous payons 22 % de cette orgie de dépenses pour angliciser davantage la société québécoise et perpétuer le rêve de certains politiciens fédéraux d’un Canada bilingue.

Seule la sortie de ce pays nous permettra de sauvegarder notre langue commune tout en étant ouverts à l’utilisation de plusieurs langues et à toutes les nationalités de la terre.

 

 

 

 

 

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