Le cinquantenaire de la section Pierre-Le Gardeur

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Monument à Pierre Le Gardeur de Repentigny (Photo : J.-P. Durand)

Après 50 ans d’existence, il est bon de s’arrêter et de regarderle chemin parcouru. La section Pierre-Le Gardeur, qui couvre la partie sud-est de Lanaudière, en est à cette étape. Voici une brève rétrospective de l’histoire de la section. La section Repentigny est née le 21 octobre 1963 quand 35 personnes se réunirent à l’école La Purification de Repentigny (devenue plus tard l’école Alphonse- Desjardins, puis Soleil-de-l’Aube). On était porté par l’enthousiasme de la Révolution tranquille, mais, fait amusant, l’assemblée de fondation se termina par le « Ô Canada »!

La section Repentigny va devenir la section Le Gardeur en janvier 1972, à la suite de l’absorption de la section De Lorimier de L’Assomption. Nouveau changement de nom pour Pierre-Le Gardeur en 1987, de manière à éviter l’identification avec la seule ville de Le Gardeur.

Au premier président, Jacques Vadboncoeur, succédèrent, entre autres, Marcel Coderre (1964-1969), Jean-Marie-Cossette (1970-1973), Léon Simard (1974-1978), Aurélien Boisvert (1978-1981), Émilien St-Maurice (1982-1984), Claude Richard (1986-1989), René Asselin (1994-1996; 2005-2006), Yolande Gingras (1999-2004) et Claude J. Allard (2006-2010; 2011-2013).

Il y eut des hauts et des bas durant ces 50 ans. Si, certaines années le nombre de membres a atteint presque 200, d’autres années les effectifs ont été réduits à quelques dizaines. Ce fut le cas vers la fin des années 1960. En pleine Crise d’octobre, il n’y eut que neuf personnes de présentes à l’assemblée générale du 8 novembre 1970 qui porta à la présidence de la section Jean-Marie Cossette, frais sorti d’un séjour en prison, sans procès évidemment, gracieuseté de Pierre Elliot Trudeau. Les troupes se regarnirent.

La section a tenté d’influencer le milieu en touchant à beaucoup de choses. Mais les lignesd’action – et de force – de la section sont toujours restées la langue, le statut politique duQuébec, l’histoire nationale et les valeurs québécoises.

En matière de langue, dès les débuts, on s’attaqua à ce qu’on appelait alors la francisation. Car on n’a pas idée, malgré l’anglicisation relative des raisons sociales actuelles, combien, avant la loi 101, les commerces francophones étaient affublés de noms anglais comme Bob Steak House, Gould Auto Body, Montréal-Nord Tire Shop, etc. On fit pression sur pression. En 1975, le président, Léon Simard, s’adressa au gérant du magasin Dominion (transformé par la suite en Provigo) pour lui signaler que 99 % des affiches au comptoir des viandes étaient en anglais et que cela était inacceptable.

Même après l’adoption de la loi 101, vu les échappatoires de ce texte, le travail a été poursuivi. René Asselin en sait quelque chose, lui qui a essayé de s’opposer, avec succès pendant quelques mois, au changement de nom de Costco en Costco Wholesale (Costco tout sale, devrions-nous l’appeler) en 2005. Encore plus récemment, en 2010, une vingtaine de membres et sympathisants de la section sont allés piqueter devant le nouveau UPS Store. Le milieu n’a malheureusement pas suivi.

Par contre, des interventions auprès des Galeries Rive Nord de Repentigny dans les années 2000 ont fait en sorte que la proportion de chansons en français dans la musique d’ambiance s’est accrue.

Sur un plan plus large, la section a participé aux grandes campagnes en vue d’imposer et de faire respecter le français comme langue officielle. En 1969, des membres passent presque un mois au centre commercial Place Repentigny pour recueillir des signatures dans le cadre de l’Opération 200 000 du premier Mouvement Québec français. Qui pourra prétendre que des actions comme celle-ci n’ont pas grandement favorisé l’adoption de la Charte de la langue française, oeuvre d’un grand Lanaudois, le docteur Camille Laurin ? Après 1977, nous avons continué du mieux que nous avons pu à revendiquer une meilleure place, celle qui lui revient en somme, pour notre langue. Nous avons émis et fait publier dans les journaux de nombreux communiqués pour contrer l’offensive en faveur de l’enseignement intensif de l’anglais, ce qui est une absurdité dans le contexte précaire où est le français chez nous, et pour dénoncer les jugements de la Cour suprême affaiblissant notre régime linguistique. Dernièrement, nous avons présenté un mémoire à Québec en appui au projet de loi 14 visant à renforcer la loi 101.

À l’instar de Mylène Paquette, nous continuons à ramer et à ramer pour notre langue. Concernant le statut politique du Québec, en 1963, la section ne se déclarait pas souverainiste. Mais, dès 1964, dans un mémoire présenté au Comité parlementaire de la Constitution, on prône un État québécois quasi indépendant associé à un État canadien à l’intérieur d’une confédération de genre suisse. Cette position s’affermira avec la participation de trois délégués de la section aux États généraux du Canada français en 1966 et 1967. D’ailleurs, la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal est elle-même devenue indépendantiste à son congrès de 1968.

Dès lors, la section n’a pas manqué une occasion d’affirmer ses convictions souverainistes. Cela fut particulièrement évident pendant les campagnes référendaires de 1980 et de 1995.En avril 1980, la section sollicite et obtient le statut de groupe affilié au Regroupement national pour le Oui, ce qui lui permettra de faire paraître pendant deux semaines dans un journal local un placard appuyant le Oui.

En 1995, avec l’appui du conseil, des membres ont pris sur eux de confectionner quatre grands panneaux publicitaires de 4 pieds sur 8 qu’ils ont eux-mêmes dressés à des points névralgiques de la circonscription de L’Assomption. Sans compter l’engagement personnel de nombreux militants dans le camp souverainiste. Rappelons que le Oui l’a emporté haut la main dans L’Assomption représentée par Jacques Parizeau.

Sur le plan de la promotion de l’histoire, notre bilan est particulièrement reluisant. Sous la gouverne de Carmen Viel-Robert et Louise Plouffe, la section organise à partir de 1979 un concours d’histoire au primaire. L’aventure durera onze ans. La plupart du temps, on demandait aux élèves de 4e, 5e et 6e année de présenter sous forme orale un personnage de notre histoire comme Radisson, Iberville et Jeanne Mance. En 1990, l’intérêt se porte vers le secondaire. Claude Richard entreprend alors la mise sur pied d’un concours d’histoire nationale destiné aux élèves de 4e secondaire de la région. Le concours se maintiendra jusqu’à aujourd’hui. Les thèmes abordés vont du Québec de Champlain jusqu’à La Révolution tranquille, en passant par Les Filles du roi, La Conquête, Les Patriotes de 1837-1838, etc. Le total des prix s’est haussé peu à peu pour dépasser les 1000 $ annuellement. En 24 ans, nous avons inscrit plusieurs centaines d’élèves qui ont développé leur intérêt pour l’histoire du Québec.

À l’automne 2000, Jean-Marie Cossette (à droite) est nommé Patriote de l’année. On le voit ici avec Guy Bouthillier, alors président de la SSJB.  (Photo : Jean-Daniel Cossette)
À l’automne 2000, Jean-Marie Cossette (à droite) est nommé Patriote de l’année. On le voit ici avec Guy Bouthillier, alors président de la SSJB. (Photo : Jean-Daniel Cossette)

La question des valeurs de notre société a toujours été sous-jacente à l’action de la section, mais elle a pris plus d’importance ces derniers temps. C’est ainsi qu’en 2007 nous avons présenté un mémoire étoffé de 16 pages à la Commission Bouchard-Taylor. Nous nous sommes prononcés contre les accommodements dits raisonnables en soutenant que la nation québécoise est ouverte aux nouveaux arrivants, mais que c’est à ceux-ci de s’adapter, avec notre aide bien sûr, à notre mode de vie, et non pas le contraire. Cette opinion n’a pas varié depuis et c’est fermement que nous avons appuyé le projet de charte de la laïcité et des valeurs du gouvernement Marois. Nous avons diffusé cette position dans la presse locale.

Voilà un tour d’horizon bien rapide de nos 50 ans d’existence. On aurait pu parler de bien d’autres réalisations, par exemple des premières fêtes de la Saint-Jean, devenues depuis Fêtes nationales, organisées par la section avant de passer le flambeau à la ville de Repentigny. On aurait pu parler des conférences nombreuses présentées par la section, à l’occasion ou non de déjeuners, de soupers ou du concours d’histoire; à peu près tous les porte-parole du mouvement nationaliste sont passés par la région grâce à la section, de Gilles Proulx à Gérald Larose, sans oublier Gilles Rhéaume, Marcel Tessier, Yves Michaud, Guy Bouthillier, Pierre Duchesne, Lucia Ferretti, Éric Bédard, Jacques Binette, etc.

Nous aurions même pu parler des soirées de danse organisées par Léon Simard pour resserrer les liens entre les membres. Les anciens se souviennent du fameux bal costumé tenu à l’occasion du tricentenaire de Repentigny en 1971 et marqué par la présence des 16 membres de la famille Dion, dont notre Céline nationale, alors toute petite.

Nous aurions pu également mentionner la participation active de la section à la plupart des actions et activités de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, qui, en retour, a appuyé presque toutes nos initiatives. Un de nos membres illustres, Jean-Marie Cossette, a rempli quatre mandats d’un an comme président général; issus de nos rangs aussi, René Asselin a siégé à l’exécutif et Jean-Pierre Durand a été vice-président de la Société et y siège toujours comme conseiller.

 

LA SECTION PIERRE-LE GARDEUR A FÊTÉ SES 50 ANS

Le dimanche 15 décembre dernier, malgré une tempête et un froid fort importuns, la section Pierre-Le Gardeur a fêté ses 50 ans d’existence. Plus de 60 des 80 personnes qui avaient réservé leur place se sont réunies au Centre à Nous de Repentigny pour un déjeuner agrémenté d’une conférence de M. Gilles Laporte.

Après une minute de silence à la mémoire des disparus, le président de la section, Claude J. Allard (NDLR : le président actuel de la section est Jocelyn Jalette), a rendu hommage à deux militants de longue date, Denis et Roger Dormoy, et Mario Beaulieu leur a remis la médaille de la Société.

Puis Claude Richard a résumé à grands traits les 50 ans de la section (voir le texte ci-contre) et Jean-Daniel Cossette a évoqué la figure de son père Jean-Marie, en présence de sa mère, bien sûr.

Au terme du repas, le conférencier Gilles Laporte s’est lancé dans un magistral exposé de la genèse de la Société Saint-Jean-Baptiste, de ses rapports avec les Patriotes de 1837-1838 et de son rôle dans la société québécoise de sa fondation jusqu’à aujourd’hui. À son habitude, il a captivé son auditoire du début à la fin.

Caroline Cantin, conseillère à la section et en charge de l’événement, a remercié l’orateur et, en conclusion, Scott McKay, alors député de Repentigny, a félicité la section de son action depuis un demi-siècle.