L’effacement du français

Antoine Robitaille | Journal de Québec

 

Au moment d’écrire ces lignes, quelques heures avant le débat des chefs, j’ignore s’il a été question du français.

Peut-être un peu dans le segment « identité et question nationale », notamment en lien avec la déclaration de François Legault sur ses craintes que ses petits-enfants ne parlent pas français.

Pictogrammes

Gageons qu’on lui a reproché, qu’on a laissé entendre que c’était « xénophobe ».

Je me sens coupable, car j’éprouve à l’occasion des inquiétudes similaires. Pas à cause de l’immigration, mais surtout de l’indifférence, à l’égard du français, de mon gouvernement et d’une partie de ma société.

Dernier exemple, le ministre des Transports André Fortin a décidé qu’on éviterait désormais le plus possible le français sur les panneaux routiers pour le remplacer par des… pictogrammes.

Il a suffi d’une pétition de moins de 7000 noms réclamant le bilinguisme sur « tous les panneaux et alertes/messages électroniques relatifs à la santé ou la sécurité ».

Pour ne pas céder au bilinguisme proscrit par la loi, Fortin a opté pour l’effacement du français.

Sécurité

« C’est une question de sécurité », a insisté le député David Birnbaum. Depuis 1977 (année de l’adoption de la loi 101), l’affichage français a-t-il mis en péril la sécurité des automobilistes ? En tout cas, le bilan routier du Québec n’a cessé de s’améliorer depuis.

Le français semble déranger sur ce continent. Plusieurs Québécois intériorisent ce sentiment. Au lieu de valoriser leur différence, ils s’en excusent, souhaitent la « pictogrammiser ».

Même si le Québec est officieusement une « province bilingue », ils voudraient qu’il le devienne officiellement. Pour qu’aucun anglophone, jamais, ne se fasse « imposer » ne serait-ce qu’un peu de français.

Le Nouveau-Brunswick, officiellement « bilingue », lui, n’est pas foutu d’organiser un débat des chefs en français. De notre côté, nous en aurons un en anglais, la semaine prochaine. Parfois, j’ai l’impression que nous aspirons à devenir, selon la formule grinçante de Michel Hébert, un « nouveau Nouveau-Brunswick ».

 

 

 

 

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