Les enseignants québécois sont-ils prêts au retour de l’enseignement des connaissances ?

Montréal, le 27 novembre 2017 – La Coalition pour l’histoire publie aujourd’hui une étude importante concernant la formation des maîtres en histoire. Cette étude plaide pour le renforcement de la formation disciplinaire des enseignants en histoire et pour une plus grande flexibilité des parcours menant à l’exercice de la profession.

Suite à l’action menée notamment par la Coalition, les élèves québécois ont enfin droit depuis septembre 2017 à un cours d’histoire réformé en 3e et 4e secondaire. Unanimement salué, ce nouveau cours d’histoire du Canada et du Québec emprunte désormais une trame chronologique, résolument axée sur l’acquisition de connaissances et l’apprentissage de la méthode historique. Dans ce contexte, il y a lieu de se demander si la formation que reçoivent les enseignants québécois les prépare adéquatement au retour à l’enseignement des connaissances.

C’est le point de départ de l’étude qui porte sur la formation des futurs enseignants dans les universités québécoises et sur le niveau de satisfaction des enseignants quant à la formation reçue. Pour ce faire, trois chercheurs, l’historien Gilles Laporte, l’enseignant Laurent Lamontagne et la chercheure en histoire Myriam D’Arcy, ont étudié le cursus proposé à travers chacun des 14 programmes de formation des maîtres dans dix universités québécoises. Ils ont aussi interrogé plus de 200 enseignants d’histoire sur leur cheminement académique et leur niveau de satisfaction à propos de leur formation. Les chercheurs ont également mené des entrevues approfondies avec certains répondants pour mieux comprendre le sens des résultats obtenus au cours de cette enquête.

Les constats

Les résultats de l’enquête sont accablants. Le baccalauréat en enseignement secondaire de quatre années accorde la part du lion aux cours de didactique, de psychopédagogie et de science de l’éducation en général. En revanche, moins de la moitié des cours suivis concerne la formation disciplinaire des futurs enseignants, soit la géographie et l’histoire. « Le constat est particulièrement dramatique à propos de l’histoire du Canada et du Québec. Tandis que les futurs enseignants doivent offrir 200 heures de cours sur ce thème dans le programme d’Univers social, ils n’auront suivi pour s’y préparer que trois cours dans le cadre de leur formation universitaire, dont seulement deux obligatoires, généralement les cours d’histoire du Canada avant et depuis 1867 » a déclaré Gilles Laporte, co-auteur du rapport et porte-parole de la Coalition pour l’histoire.

« Si les enseignants semblent adéquatement formés pour gérer une classe, évaluer une compétence et évoluer dans le système d’éducation, il est évident qu’ils n’ont pas reçu le bagage disciplinaire suffisant pour enseigner adéquatement l’histoire nationale et exposer leurs élèves à des connaissances qui aillent un tant soit peu au-delà de ce qu’ils peuvent trouver dans le manuel de classe ou sur Internet » a poursuivi monsieur Laporte.

Les recommandations

Fort de ces constats mais conscients de la complexité des enjeux et des dilemmes auxquels font face l’enseignant et l’école québécoise, les chercheurs y vont de neuf recommandations nuancées qui visent d’abord à soutenir le travail déjà mené dans les établissements, soit :

  • renforcer la formation disciplinaire, notamment en géographie et en histoire du Canada et du Québec.
  • accroître la flexibilité de la filière de la formation des maîtres au Québec de sorte que, par exemple, le détenteur d’un baccalauréat disciplinaire puisse enfin accéder à l’enseignement après une formation d’appoint en pédagogie, et que les directions d’écoles disposent de plus de latitude dans la répartition des ressources enseignantes et dans la manière d’atteindre les objectifs et standards.
  • installer un véritable dialogue entre les facultés d’éducation qui forment les enseignants et les établissements scolaires qui les embauchent.

« Nous sommes d’avis que les constats posés sur les lacunes de la formation disciplinaire des enseignants d’Univers social s’observent dans d’autres programmes, tels l’enseignement du français ou des sciences de la nature. Le nombre de crédits accaparés par la formation en sciences de l’éducation y est tout aussi disproportionné et la formation disciplinaire des futurs enseignants d’autant plus lacunaire. Voilà pourquoi nous croyons aujourd’hui que les constats et recommandations de cette étude doivent être examinés attentivement pour en tirer les leçons qui s’imposent » a conclu Gilles Laporte.

Prendre connaissance de l’étude sur la formation des maîtres en histoire