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Les Rhodésiens toujours aussi mange-Canayens

par Christian Gagnon  |  Le Patriote

Sans nouvelles d’eux depuis la contestation du projet de loi 14 du gouvernement Marois, vous les pensiez disparus, comme les derniers dinosaures du Crétacé. Eh bien non. Plus acharnés que jamais, les opposants aux dispositions de la Loi 101 sur l’affichage étaient de retour devant les tribunaux, le 28 janvier dernier. Deux bonnes douzaines de commerçants représentés par l’ineffable Me Brent Tyler n’ont toujours pas accepté la légitimité de la Charte québécoise de la langue française. La Cour suprême l’a pourtant confirmée en 1988, mais ces 24 commerçants reviennent à la charge, eux qui contestent leurs constats d’infraction devant les tribunaux depuis… entre 14 et 17 ans! Leur nouvelle plaidoirie illustre à merveille l’affligeante furiosité de leur entêtement. Ils prétendent que depuis que le plus haut tribunal du Canada les a déboutés, la situation du français a changé à un point tel que l’exigence de prédominance du français dans l’affichage commercial n’est plus justifiée.

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Ces dames de CRITIQ (Canadian Rights in Quebec) ont bien voulu afficher brièvement un petit sourire de façade pour les caméras.

Devant le juge Salvatore Mascia de la Cour supérieure du Québec, Me Brent Tyler a fait comparaître son expert, le démographe Calvin Veltman, qui a soutenu qu’il n’y avait pas de fondement scientifique démontrant la vulnérabilité du français au Québec et que même si cette démonstration était faite, la langue d’affichage n’y remédierait pas. L’expert de la poursuite, le démographe Marc Termote, a au contraire établi que depuis 1988, les francophones étaient devenus minoritaires à Montréal et que pour l’ensemble du Québec, les 9 % d’anglophones ralliaient toujours la moitié des transferts linguistiques des allophones cessant de parler leur langue maternelle à la maison. Le juge Mascia (pourtant anglophone, comme s’en est étonné le journaliste de CTV News) a donné raison à Termote.

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L’homme d’affaires Gary Shapiro n’est pas gêné de dire sur les ondes de CTV News qu’il refuse depuis… 1998 (!!!) que le français soit prédominant sur les camions de son entreprise.

Gary Shapiro, fondateur du groupe CRITIQ (« Canadian Rights in Quebec », critiq.ca) n’a pas fait mystère de son dégoût : It reconfirms that we’re really second class citizens in a first class country in a zero-class province (Cela confirme à nouveau que nous sommes des citoyens de seconde classe dans un pays de première classe dans une province n’ayant aucune classe). Pourtant, M. Shapiro n’est sûrement pas si malheureux au Québec, lui qui est propriétaire des Entreprises Garanties inc. (qu’il appelle aussi « Guaranteed Industries »), une prospère société montréalaise de ventilation et climatisation fondée en 1957. Ancien président d’Alliance Québec et candidat du Parti Égalité, Me Tyler a aussitôt fait connaître son intention d’en appeler de cette décision et de persister jusqu’en Cour suprême si nécessaire.

 

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Une fois le verdict connu, le proverbial flegme britannique a vite cédé à la fielleuse rancoeur.

Une militante de CRITIQ n’a pu contenir sa frustration devant la caméra de Global News : How are we supposed to fight this? That francophones clearly look at us and say “our rights override yours” is absolutely unbelievable! And we have to take this? Why??? (Comment sommes-nous supposés combattre cela? Le fait que les francophones nous regardent en nous disant clairement «nos droits ont préséance sur les vôtres» est absolument incroyable! Et nous devons accepter cela? Pourquoi???) Une autre n’en revenait pas moins. Nos droits sont bafoués depuis 40 ans, a confié Sharon Brian au Journal de Montréal. Je suis dégoûtée. Ça me rend malade, a-t-elle conclu avec beaucoup d’amertume.

 

L’avocat Brent Tyler.
L’avocat Brent Tyler.

Et ces personnes ne sont pas seules. L’avocat Harold Staviss, de Hampstead, et la conseillère municipale de Côte-Saint-Luc Ruth Kovac font des démarches continuelles auprès des petits et grands commerçants du centre-ville de Montréal pour que leur affichage soit bilingue, afin de mettre fin à ce qu’ils appellent la discrimination à l’ égard de la communauté anglophone. Ils font sans cesse pression auprès du ministère québécois des Transports pour que la signalisation routière soit bilingue. Ils insistent sans relâche auprès des services municipaux de Montréal pour que leurs comptes Twitter soient bilingues.

Le 28 janvier dernier, le journal The Suburban faisait sa manchette principale avec la nouvelle leur apparaissant outrageante à l’effet qu’aux centres commerciaux Quartier Cavendish et Côte-Saint-Luc, les kiosques de Loto-Québec ont depuis décembre dernier pour mandataire la Société Saint-Jean-Baptiste de Richelieu-Yamaska. Quel est l’insoutenable scandale? Une organisation séparatiste touchera une commission sur la vente de billets de loterie achetés et des montants remportés par des clients surtout fédéralistes, écrit l’hebdomadaire qui, en 1995, fut virulemment partitionniste. Pour tenir paisiblement boutique dans l’ouest de Montréal en 2015, il faut donc apparemment passer un test de pureté fédéraliste.

Certains chroniqueurs québécois anglophones ne se gênent pas pour surnommer les inspecteurs de l’OQLF les « Tongue Troopers », qualifiant aussi les défenseurs du français de « Language Hawks ». Pourtant ces fonctionnaires et citoyens n’affichent jamais la virulence et la hargne des dénégateurs obsessionnels de la précarité du français au Québec. Au temps des succès électoraux du Parti Égalité en 1989, le journaliste Jean-V. Dufresne les appelait gentiment les « angryphones ». Ces anglo-Montréalais les plus intransigeants sur le plan linguistique mériteraient pourtant d’être affublés d’un surnom plus péjoratif. En 1973, René Lévesque les avait qualifiés de « Rhodésiens de Westmount ». En 2015, de toute évidence, ils existent toujours. •••

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