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Lise Ravary et le déni de la francophobie

Dans un récent blogue dans le Journal de Montréal, Lise Ravary nie carrément l’existence de la francophobie : «des francophobes, des gens qui ont ‘peur’ des francophones ou de la langue française – une phobie, c’est aussi une peur déraisonnable – je n’en connais pas. Vous en connaissez,vous ? » Et Madame Ravary de poursuivre en citant en exemple Barbara Kay du National Post.  «Elle est très critique des politiques linguistiques mais elle n’a pas peur du français et ne déteste pas les francophones.»

Si Madame Ravary ne voit pas la peur et la diabolisation des défenseurs du français dans les propos de Barbara Kay, elle n’en verra jamais nulle part. Madame Kay a récemment fait la manchette du National Post en disant avoir peur de parler en anglais dans les rues de Montréal, de peur de se faire agresser physiquement. Elle pense que le son de l’anglais est devenu offensant à Montréal à cause des revendications de la première ministre du Québec pour le français, qui seraient hostiles et xénophobes, qui feraient appel au côté sombre de la nature humaine. Le PQ serait crypto-faciste. C’est sans compter divers propos semblables dans ses textes antérieurs.

BarbaraKay photo francophobie

Cliquez pour visionner une entrevue de Barbara Kay à l’émission Les francs tireurs

Parallèlement, Lise Ravary trouve que je tente de faire peur au monde et que je trace un portrait apocalyptique de la situation du français. Je lui recommande de consulter les données de Statistique Canada qui montrent non seulement que le pourcentage de francophones de langue maternelle à Montréal se retrouve sous la barre des 50 % et sous les 80 % dans l’ensemble du Québec (48,7 % et 78,9 %), mais que le français recule aussi en tant que langue d’usage à la maison, alors que le poids de l’anglais, langue d’usage, tend à augmenter. Sur l’île de Montréal, la proportion des francophones selon la langue parlée à la maison est de 53 %, soit 8,8 points de pourcentage de moins qu’en 1986 (61,8 %). C’est énorme. Les études de prévisions démographiques effectuées par le président du Comité de suivi de la situation linguistique à l’Office québécois de la langue française (OQLF), Marc Termote, prévoient un déclin rapide des locuteurs du français à Montréal (de 54 % en 2006 à 42 % en 2051) qui se répercutera sur l’ensemble des régions du Québec (de 82 % en 2006 à 72 % en 2051).

Ce n’est pas un scénario apocalyptique, comme le prétend Madame Ravary, car cette tendance pourrait facilement être inversée par des mesures d’aménagement linguistique normales, comme celles utilisées dans la plupart des pays occidentaux. Il existe des lois linguistiques partout dans le monde, soit dans quelques 190 États et 110 pays, dont le Canada et les États-Unis. Pourquoi au Québec seraient-elles un signe de fermeture de et d’intolérance?

Madame Ravary associe notre campagne contre la francophobie à de la «victimite». En fait, ce qui risque de faire de nous des victimes, c’est de se complaire dans l’aveuglement volontaire devant cette culpabilisation quasi-quotidienne visant à réprimer tout renforcement de la Charte de la langue française et à détourner l’attention du déclin du français au Québec et au Canada.

Pour qu’il y ait un débat respectueux et démocratique qui débouche sur de véritables solutions, il faut d’abord ne plus accepter de nous faire intimider en nous laissant qualifier collectivement de racistes.

Mario Beaulieu,
président de la SSJBM et du Mouvement Québec français

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