Il est de bon ton, parmi un certain nombre de commentateurs politiques, de même que chez plusieurs politiciens — généralement, ceux-ci sont aussi, le plus souvent, associés aux milieux fédéralistes — d’accuser ceux qui se disent préoccupés par des questions d’ordre identitaires, telle la défense de la langue, de frayer avec l’extrême-droite, la xénophobie, ou le racisme. C’est de bon ton.
L’ironie dans tout cela réside en même temps dans le fait que bon nombre de ces gens » bien-pensants » se disent eux-même de droite et n’hésitent pas non plus à tomber dans les mêmes travers, soit le populisme, que ceux qu’ils disent avoir en horreur. Soit l’extrême-droite.
Le récent référendum tenu en Grande-Bretagne et la victoire du » Brexit » sont devenus, selon ces mêmes gens, un argument de poids pour convaincre monsieur et madame tout le monde de rester loin de tout ce qui pourrait ces questions. On tombe alors, allègrement, dans l’amalgame et le n’importe quoi, pourvu que cela serve » la cause » de leur propre orientation politique.
Heureusement que tout le monde ne tombe pas dans ce panneau.
Ci-joint, vous trouverez un communiqué signé par André Parizeau. Ce dernier réagit à différents récents incidents survenus dans le nord de Montréal, dans le quartier d’Ahuntsic, ayant tous un rapport avec la manière dont les élus et les autorités, au sein des services publics, devraient agir pour mieux défendre le français. Ce texte fut écrit à la demande exprès du Conseil de la section Nicolas Viel de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal (SSJB).
Jusqu’à récemment, André Parizeau était président de cette section. Ne pouvant plus continuer à remplir ce mandat à cause de ses multiples autres responsabilités, lesquelles incluent entre autres d’être maintenant, en surplus de tout le reste, le nouveau président de l’Association du Bloc québécois dans Ahuntsic-Cartierville, il a depuis été remplacé, à la tête de la section Nicolas Viel de la SSJB, par Philippe Dujardin.
Ce texte se veut, entre autre chose, une réponse à une récente sortie de la députée libérale locale, au niveau provincial. Soit madame Marie Montpetit. Cette dernière s’insurgeait, pas plus tard que la semaine dernière, contre des attaques la ciblant elle-même et qu’elle avait alors jugées comme étant » gratuites, sans fondement, rigueur, ou contexte « .
Une version abrégée de ce texte fut envoyée aux médias locaux.
La Société Saint-Jean Baptiste de Montréal (SSJB), section Nicolas Viel, désire sonner l’alarme face à une tendance de plus en plus marquée chez certains élus locaux, de même qu’auprès des autorités œuvrant au sein de nos services publics, dans Ahuntsic, consistant à banaliser l’impact des reculs actuellement subis au niveau du français, comme langue commune d’usage.
Les grands médias ont eux-mêmes, et plus d’une fois, souligné les reculs du français au niveau de la grande région de Montréal. Conséquemment, de manière à justement mieux protéger ce «bien » important, qui est notre langue commune, on s’attendrait à ce que les autorités locales redoublent d’efforts pour contrer un tel état de fait et prennent plus de moyens pour assurer la promotion du français . Certains le font, et c’est très bien, mais cela n’est pas pour autant la règle partout.
Deux exemples récents, passé relativement inaperçus jusqu’ici, illustreront ce constat.
Le premier exemple concerne la députée libérale de Crémazie, Marie Montpetit. Elle et son collège et député libéral Marc Tanguay ont été à l’avant plan pour faire battre, le 12 mai dernier, à l’Assemblée nationale, à Québec, une résolution visant à réaffirmer la primauté du français ainsi que la « responsabilité historique » du gouvernement du Québec à défendre cette langue, laquelle avait au départ l’appui de tous les autres partis, soient le PQ, Québec solidaire et la CAQ, et avait été déposée la veille. Cette motion demandait également une modification à la Charte de la langue française afin d’assurer une plus nette prédominance du français dans l’affichage commercial au Québec, en lien avec le fameux jugement de la Cour d’appel dans la cause défendue par plusieurs grosses multinationales comme Walmart ou Costco.
Nous , à la SSJB, ne pouvons qu’être d’accord avec un tract diffusé durant la vente trottoir, sur la rue Fleury, la fin de semaine dernière, lequel mettait en cause le geste de notre députée (voir photo plus haut). Ce geste n’avait pas d’allure, quoique que la principale intéressée, ou son attaché politique, puissent dire ou prétendre.
Réglons une chose d’entrée de jeu : contrairement à ce que l’attaché politique de madame Montpetit, Jonathan Boursier a pu laisser entendre, dans le cadre d’une mise au point, mise en ligne sur le site Internet du journal de quartier Les Voisins, ce tract ne portait ni la signature du Bloc québécois, ni non plus celle du Parti québécois (PQ). C’était plutôt une initiative de membres de la SSJB. Nous tenons à le préciser. Nous ne nous en cacherons pas.
Sur le fond maintenant, les libéraux peuvent bien prétendre être d’accord avec tous les différents partis d’opposition, dont le PQ, pour reconnaitre l’importance du français – ils divergeraient seulement sur les moyens, selon eux –, encore faudrait-il que leurs gestes correspondent aussi à leurs promesses et qu’ils nous expliquent vraiment comment par leurs propres actions ont permis de freiner les reculs subis par le français.
Or, à ce niveau, c’est plutôt le désert et ce ne sont pas les commentaires désobligeants de leurs porte-paroles sur le fait que le PQ et le Bloc se complairaient dans « les attaques gratuites, sans fondement, rigueur, ou contexte » qui nous feront oublier leur propre bilan.
La modification des règlements touchant à l’affichage serait une mesure suffisante, pensent les libéraux. C’est leur droit, mais c’est aussi notre droit de penser que cela est nettement insuffisant. Notez qu’il y a bien juste les libéraux et peut-être aussi le Conseil du patronat pour penser qu’ils en font assez en matière de protection de la langue. Mais tous les autres auraient tort tandis que seuls eux auraient raison…
En fait, en agissant comme cela, ce sont plutôt eux qui se peinturent dans un coin encore plus.
Autre exemple , portant cette fois sur un autre évènement : à la fin avril, à l’école primaire Louis-Colin, eut lieu, sans aucune véritable consultation avec les parents au préalable, ce que les autorités de l’école ont appelé le « English T-Shirt Day ». Prenez note que le mot « day», dans un tel contexte, a une signification très particulière puisqu’il réfère alors à une forme de célébration. Ce jour-là, tous les élèves ainsi que le personnel de l’école devaient porter un t-shirt portant une expression en anglais et devaient aussi le plus possible s’exprimer en anglais.
Une plainte fut ensuite déposée par des parents en lien avec la manière dont tout cela a lieu ; cette plainte remettait également en cause la pertinence d’organiser dans nos écoles de telles activités. Il faut dire ici que c’était la première fois qu’une telle chose arrivait .
Ce qui s’est passé à l’école Louis Colin n’était pas, en même temps, un évènement isolé puisque, toujours durant le mois d’avril, au moins une demi-douzaine d’autres écoles, appartenant cette fois à la Commission scolaire des Affluents, dans la zone du 450, organisèrent également le même genre d’activité, dans le cadre de ce qu’elles appelaient le mois de la « promotion de l’anglais » (!!!).
Dans au moins 1 cas, cela alla aussi loin que de s’associer à la compagnie Costco (la même qui fut impliquée dans les démarches contre la loi 101) pour fournir aux enfants, des collations gratuites, à condition que les enfants les demandent en anglais. Ne trouvez-vous pas qu’il y a en plus un problème éthique ici, en surplus de tout le reste ?
La plainte touchant l’action à l’école Louis Colin fut rejetée par les autorités scolaires sur la base que cela cadrerait parfaitement avec la politique de la commission scolaire de Montréal visant à faire la promotion des diversités culturelles dans nos quartiers. Mais depuis quand la promotion de cette même diversité culturelle se ramènerait à la seule promotion de la langue anglaise ? Est-ce vraiment en quoi se limiterait cette politique ?
Aucune autre activité du même genre n’avait eu lieu dans les mois précédents en espagnol, en arabe, ou dans n’importe quelle autre langue connue et utilisée dans Ahuntsic et il serait douteux que cela se ferait de toute manière. Imaginez seulement les problèmes qui pourraient résulter de la multiplication de telles activités dans toutes les différentes langues possibles. Clairement, l’argument ne tient pas.
Il faut rajouter en surplus le fait que l’école Louis Colin dispense déjà un programme d’anglais intensif, au niveau de la 6e année. Aucun parent, à l’école Louis Colin, ne s’est jusqu’ici opposé à l’apprentissage de l’anglais à l’école. Nous voudrions également dire qu’il y a toute une marge entre faire et encourager l’apprentissage de l’anglais – ce qui est tout à la fois normal – et faire, en surplus, une promotion active de cette langue, comme si elle en avait vraiment besoin de toute manière.
Favoriser l’élargissement des connaissances et des langues est louable. Il faut aussi encourager la recherche constante de nouvelles méthodes pédagogiques. Mais là, on est clairement ailleurs et on se tire nettement dans le pied en posant de tels gestes.
À défaut de pouvoir obtenir à brève échéance une bonification de la loi 101, ce qui serait idéal, il nous semble important de réaffirmer dans le contexte le fait que nos élus, ainsi que les différentes autorités locales dans nos quartiers devraient beaucoup plus intégrer la défense ainsi que la promotion de la langue française au niveau de leurs priorités et être en même temps plus vigilants quant aux impacts possibles de leurs propre actions en la matière.
Le français n’est-il pas justement un de nos acquis communs les plus importants ?
La section Nicolas Viel de la SSJB couvre un large territoire incluant à la fois l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville, ainsi que celui de Saint-Laurent. Elle a notamment comme mandat de veiller à la défense du français, mais aussi de favoriser le maximum d’unité des forces souverainistes dans le but d’ainsi mieux faire avancer la cause de l’indépendance du Québec.
La section Nicolas Viel de la SSJB fait partie de la « table régionale de la convergence souverainiste » d’Ahuntsic-Cartierville laquelle regroupe également le Bloc québécois, ainsi que le PQ Acadie et le PQ Crémazie. Lors de la dernière rencontre de cette table de coordination, les différents représentants de ces partis s’entendaient pour dire que les faits relatées ici sont effectivement très préoccupants.
Tracts contre elle sur La Promenade
Marie Montpetit réaffirme l’importance de donner priorité au français
Quelques jours avant les célébrations de la Fête nationale, des individus ont tenu à faire part de leur mécontentement à l’endroit de la députée de Crémazie sur la Promenade Fleury dans le dossier de l’affichage commercial.
Un tract anonyme la visant a été distribué les journées de fermeture de rue sur Fleury Est afin de dénoncer son intervention à l’Assemblée nationale quand le gouvernement Couillard avait rejeté il y a un peu plus d’un mois la motion du député péquiste Maka Kotto sur la place du français dans l’affichage commercial.
Le critique péquiste estimait que Québec n’allait pas assez loin quand il a tranché par voie réglementaire, au lieu de modifier la Charte de la langue française, dans sa réponse à un jugement de la Cour d’appel.
Le juge avait dit, entre autres, que le gouvernement n’avait pas le droit d’imposer un descriptif au nom de l’entreprise sur la façade d’un commerce. Avec l’approche du gouvernement maintenant, le descriptif est l’une des options que peuvent envisager les 1860 entreprises touchées.
Concrètement, les mots en français peuvent se trouver sous la forme d’un descriptif, d’un slogan, ou sur une affiche annonçant les produits à l’intérieur du magasin. Comme condition, l’affiche doit être en français, éclairée, tout en se trouvant dans le champ de vision global de la façade du commerce. Par exemple l’ajout de « Supercentre » à l’enseigne Walmart serait conforme.
Mais certains considèrent que le tout est insuffisant. Ici, dans Crémazie, ils ont tenu à dire que Mme Montpetit, dans le débat, (NDLR : elle avait pris la parole en Chambre), a ainsi combattu les « protecteurs du français ».
Réplique libérale
Au bureau de la députée, sur la rue Fleury, on s’explique mal cette intervention et le ton utilisé. « Le gouvernement et le Parti Québécois partagent les mêmes objectifs, mais pas les mêmes moyens », a indiqué Jonathan Boursier, attaché politique au bureau de Marie Montpetit.
On signale que dans le débat entourant la motion, le gouvernement — dont Mme Montpetit— sont « tout à fait en accord » avec les trois premiers paragraphes quand on parle d’affirmer la primauté du français, la langue officielle du Québec, protéger en tout temps le français et la Charte de la langue française.
M. Boursier a même fait sortir le verbatim de l’intervention de la députée de Crémazie dans le débat. « […] oui, le français est primordial, que, oui, nous nous devons de protéger la langue française, notre langue officielle. Nous y tenons, et chaque pas que nous faisons va en ce sens », a-t-elle soutenu.
Règlement versus charte
Pour le bureau de Mme Montpetit, un problème se pose avec le quatrième et dernier paragraphe; le PQ estime que seule une modification législative aurait permis de répondre au jugement du 25 avril.
Marie Montpetit a tenu à rappeler que le gouvernement a choisi d’agir sur le champ par une modification réglementaire.
À son avis, les modifications dévoilées au début mai permettent d’assurer une plus grande présence du français dans l’affichage des marques de commerce. « Par le biais de ces modifications, que ce soit par l’ajout permanent d’un générique, d’un descriptif, d’un slogan ou d’une information portant sur les services ou produits offerts, l’affichage au Québec sera enrichi d’une plus grande présence de messages en français », a-t-elle mentionné.
Guerre de mots
« La protection et la promotion du français sont essentielles pour Mme Montpetit, rajoute Jonathan Boursier. On peut certainement débattre du meilleur moyen de réaliser un objectif commun sans faire de procès d’intention. Malheureusement, ce tract est un autre exemple navrant de la façon de faire de la politique privilégiée depuis quelques années par le PQ de Crémazie et le Bloc Ahuntsic-Cartierville : des attaques gratuites, sans fondement, rigueur ou contexte », a-t-il conclu.
Le dépliant politique estimait que Mme Montpetit avait « manqué à son devoir de représenter tous les citoyens de Crémazie ». (Par Alain Martineau) (2016-06-23)