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Oui, il faut beaucoup, beaucoup plus en matière de langue!

Jean-Paul Perreault | Le Devoir

 

Le respect du français comme langue d’affichage est essentiel, mais pas suffisant. – Photo: Jacques Nadeau Le Devoir

 

Impératif français offre son appui à la ministre de la Culture, Nathalie Roy, quant à son intention de faire respecter et de faire appliquer la Charte de la langue française, ou ce qu’il en reste, pour endiguer la défrancisation de l’affichage à Montréal et, nous l’espérons, aussi ailleurs au Québec. Mais il faut plus ! Beaucoup plus !

Au premier chef, le français langue de travail donne plutôt l’impression d’être une langue seconde. À peine 21,2 % des Montréalais travaillent uniquement en français. Au Québec, un travailleur sur huit est unilingue anglais, et de nombreux commerces de Montréal et de l’Outaouais, malgré la loi, persistent à imposer l’anglais en n’apprenant pas eux-mêmes le français ou en embauchant du personnel incapable de parler français, ou si peu.

Dès l’énoncé de ce premier problème, tout citoyen peut s’apercevoir que des changements profonds et pressants s’imposent dans la vision organisationnelle et la culture de cadres anglicisantes de l’OQLF. Pour bonifier sans plus attendre la Charte, il faut d’abord réinstaurer l’autonomie de cet organisme, notamment en révisant le mécanisme de nomination à sa présidence et en revalorisant l’outil citoyen de francisation, le recours aux plaintes. C’est ce dernier qui permet l’expression des revendications des citoyens. Il importe d’y faire disparaître sans attendre les insignifiances libérales du genre « lorsque la plainte relève de l’intérêt collectif et général, le plaignant n’est pas informé des actions posées par l’Office ».

 

Offre culturelle en français

La démarche globale de francisation exige que le nouveau gouvernement intervienne activement pour accroître la création et la diffusion culturelle en français. Voir et écouter les programmations de nos médias télévisuels et radiophoniques suffit à convaincre tout observateur objectif de l’avancement de l’anglicisation quand ce n’est pas l’américanisation des ondes. Certaines sociétés et boîtes de communication en sont rendues à produire et diffuser leurs messages publicitaires dans un environnement musical américain, montrant ainsi leur désintérêt pour nos artistes et notre culture. C’est blessant ! Pourtant, le Québec culturel regorge de talents. Nous invitons Mme Roy, qui est également ministre de la Culture et des Communications, à agir sur la colonisation des cerveaux et des préférences culturelles.

Devons-nous encore rappeler que nos établissements d’enseignement postsecondaire participent eux-mêmes allègrement à l’anglicisation de la relève en imposant aux étudiants de plus en plus de parcours scolaires en anglais ? Nos établissements postsecondaires de « langue française » le sont de moins en moins. Ils ont pourtant toujours pour mission essentielle de former des diplômés qui, demain, au sein des entreprises privées ou ailleurs, auront à faire du français — et non de l’anglais — la langue normale et habituelle de travail.

Et puisque le français, en plus d’être langue nationale, est la langue de travail et la langue commune d’usage public au Québec, nous croyons qu’une politique efficace de francisation doit aussi repenser les programmes d’enseignement des écoles, cégeps et universités de langue anglaise. De sorte que tous les élèves et étudiants puissent y acquérir la maîtrise du français, ce qui leur permettra ainsi de leur ouvrir l’avenir, entre autres, de la Francophonie. Et non, faute d’avoir appris le français, de les voir réclamer l’anglicisation des services publics et privés pour accommoder leur unilinguisme ou, pire, quitter le Québec après avoir profité de nos impôts au cours de leur instruction.

Le gouvernement pourrait considérer sérieusement d’augmenter l’offre et la fréquentation des programmes d’immersion ou, mieux encore, d’encourager les parents anglophones à inscrire leurs enfants dans le réseau scolaire ou de garderies de langue française.

Rappelons un cas délirant d’anglomanie : le gouvernement du Québec va offrir, en 2020 en Outaouais, une région massivement francophone, une formation en médecine qui relèvera de l’université de langue anglaise McGill. Pis encore, celle-ci s’est empressée de délocaliser une partie du programme d’études de ce cursus en médecine obligeant les étudiants des Outaouais à suivre leur année préparatoire… en anglais, à McGill University.

De tels exemples scandaleux témoignent d’une aliénation politique totale. Or ils foisonnent au Québec ! Rappelons la déclaration de l’OQLF cautionnant l’intention d’Hydro-Québec de facturer en anglais « les clients » qui en font la demande ! Ces décisions gouvernementales soulèvent clairement des questions sur le rôle anglicisant de l’État national, et sur le rôle anglicisant de ses créatures publiques et parapubliques de tous les niveaux !

 

Mandat de l’OQLF

Nous voyons d’un bon oeil l’intention du gouvernement de repenser la vision gouvernementale sur l’immigration, laquelle représente nettement un enrichissement collectif dans la mesure où son intégration au Québec français est primordiale et réussie. Or nous sommes actuellement en face d’un échec lamentable, comme le confirmait le Rapport annuel 2017 de la vérificatrice générale.

Nous déplorons actuellement que l’OQLF n’ait toujours pas rempli son mandat, alors que l’article 160 de la Charte de la langue française l’exige pourtant clairement. Nous déplorons tout particulièrement qu’il n’ait pas produit un bilan quinquennal ayant « trait à l’usage et au statut de la langue française ainsi qu’aux comportements et attitudes des différents groupes linguistiques ». Dans l’hypothèse d’une intervention appropriée, il faut un bilan objectif de la situation !

Oui, Mme Roy, Impératif français est entièrement d’accord avec l’application de la Charte, mais il faut beaucoup, beaucoup plus, car il n’y a pas que l’affichage ou les raisons sociales qui sont en cause. Une politique linguistique « nationale » et surtout « transversale » s’impose impérativement après quinze ans de dérive libérale.

 

 

 

SOURCE

 

 

 

 

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