Politique québécoise – Suspendre ses convictions

Article de Pierre Curzi publié dans Le Devoir le 6 février 2012

Sondage après sondage, 40 % des Québécois veulent faire l’indépendance, 20 % veulent le statu quo et 40 % désirent un Québec avec beaucoup plus de pouvoirs au sein d’un Canada uni. Pour les premiers, il y a Option nationale, Québec solidaire et le Parti québécois. Pour les tenants du statu quo, le Parti libéral du Québec existe déjà. Quel parti reste-t-il pour défendre une réelle position autonomiste comme celle des Duplessis, Lesage ou Johnson père?

Avis juridique

Si la CAQ veut un jour être sérieuse dans ses prétentions d’incarner un vrai parti nationaliste, elle doit faire le pari d’en arriver à une nouvelle entente constitutionnelle avec le Canada. Contrairement aux gouvernements du Québec qui se présentaient après des défaites devant le Canada anglais, les négociateurs québécois peuvent désormais s’appuyer sur un avis juridique de la Cour suprême paru en 1998 qui oblige le Canada à négocier de bonne foi.

Cet avis est un nouvel outil que les gouvernements du Québec n’ont encore jamais utilisé. Si les demandes québécoises s’appuient en plus sur la volonté populaire, il devient extrêmement difficile pour le Canada de faire la sourde oreille, puisqu’un des cinq principes qui sous-tendent la démocratie canadienne est le respect de cette démocratie. Par conséquent, si 80 % des Québécois se disaient d’accord avec le rapatriement de la souveraineté culturelle (pouvoirs sur la langue, l’immigration, la culture et les communications), le Canada devrait vraiment céder quelque chose au Québec, sans quoi il pourrait être blâmé à l’international.

Un plus grand danger encore pour le Canada serait que les 40 % de Québécois qui croient toujours qu’il est possible d’obtenir plus de pouvoirs du Canada se rendent compte que le Canada est un pays fermé aux Québécois. Inévitablement, plusieurs d’entre eux deviendraient indépendantistes et feraient du Québec un pays!

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