Josée Legault | Journal de Montréal
C’était pourtant écrit dans le ciel. Dans l’ère post-Révolution tranquille, JAMAIS, JAMAIS, AU GRAND JAMAIS, le gouvernement fédéral, quel qu’en soit le chef ou le parti au pouvoir, n’accordera au Québec le pouvoir d’être l’unique percepteur d’impôts sur son propre territoire.
Prêtons au premier ministre François Legault l’intelligence de comprendre suffisamment les choses pour l’avoir su lui-même lorsqu’il en a fait la demande à son homologue fédéral Justin Trudeau.
Lequel, de manière tout à fait prévisible, vient tout juste par ailleurs de clore le sujet d’un très gros «non».
La vraie raison?
Est-ce par crainte de faire disparaître une partie des emplois chez Revenu Canada?
Est-ce parce que le gouvernement Trudeau s’est aussi empressé d’annoncer la construction d’un nouveau centre fiscal à Shawinigan, le légendaire fief politique de l’ex-premier ministre libéral Jean Chrétien?
Peut-être, mais en partie seulement.
La vraie raison est encore plus simple.
Même si le Parti québécois est en déclin et que l’option souverainiste vivote à peine, tout gouvernement fédéral craint comme la peste qu’un jour, qui sait, même si c’est peu probable, la question de l’indépendance du Québec ne revienne le moindrement sur le tapis politique.
C’est pourquoi, sous AUCUN prétexte, un gouvernement du Canada ne prendrait le moindre risque de laisser la perception des impôts au Québec seulement.
Lui laisser la perception des taxes de vente est beaucoup plus inoffensif. Autant sur le plan politique que fiscal.
Alors, si le premier ministre du Québec se doutait possiblement de la fin de non-recevoir qu’il aurait d’Ottawa, pourquoi en a-t-il quand même fait la demande?
Hypothèse : parce qu’en tant que «nationaliste», face à son électorat, M. Legault doit se comporter de manière conséquente. Quitte même à combattre les moulins à vent fédéraux.
Aussi, en lançant sa revendication dans l’univers fédéral pré-électoral, il joue en même temps les libéraux contre les conservateurs qui, eux, s’y disent favorables, mais de toute évidence, pour des raisons strictement électoralistes.
Même le NPD qui se disait lui aussi favorable à l’idée d’un rapport d’impôt unique pour le Québec, s’y refuse maintenant.
La réalité, elle, est claire comme de l’eau de roche.
La seule manière garantie pour le Québec de gérer seul les impôts s’appelle l’indépendance.
Et comme demain n’est pas la veille…
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Addendum:
Pour un bref historique de l’adoption de la Loi créant un impôt québécois sur le revenu en 1954, c’est ici.