Une officine de banalisation de la Déportation acadienne à l’Université de Moncton

 

par David Le Gallant, Société internationale Veritas Acadie  | LE PATRIOTE

 

L’Institut d’études acadiennes dont le bailleur de fonds de fondation est le ministère du Patrimoine canadien, serait-il, grâce à son conseiller scientifique Maurice Basque, une officine de banalisation de la Déportation acadienne pour ne pas la reconnaître comme un génocide?

Pour l’historien Maurice Basque, dans une entrevue donnée en décembre dernier à Radio- Canada Ici Nouveau Brunswick (1), un génocide, c’est l’intention de faire disparaître physiquement ou de faire disparaître le plus possible sur le plan culturel une communauté. Donc, selon lui, il faudrait réfuter l’idée que la déportation des Acadiens réponde aux critères de la définition du génocide dans le texte de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. (2) Du même avis que Maurice Basque, l’historien Nicolas Landry avançait tout récemment l’idée que bien que les Acadiens traînent derrière eux une histoire tragique, la caractérisation d’un génocide serait inadéquate tandis que l’expression génocide ethnique ne doit pas être utilisée dans la même perspective, par exemple, que le génocide juif de la Deuxième Guerre mondiale.

En se référant aux idées d’un groupe (cf. Coopérative des Arcadiens de Kedgwick) qui veut relancer le débat sur le fait que la déportation des Acadiens constitue un génocide, monsieur Basque parle plutôt d’un cas de nettoyage ethnique. Pour lui, il faudrait laisser tomber cette idée de génocide et arrêter de banaliser ce terme qui ne fait que rouvrir un débat très stérile au lieu d’en savoir plus sur le Grand Dérangement… Il semble que le conseiller scientifique aurait oublié que ladite Convention valide en tant que génocide l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe ethnique. Quant à la question de faire disparaître une communauté sur le plan culturel, les représentants des États ont, à l’origine de la Convention sur le génocide, rejeté la notion de génocide culturel parce qu’on l’a jugée trop vague et trop éloignée de la destruction physique ou biologique.

Au lieu du « Mémorial du génocide acadien » préconisé par la Coopérative des Arcadiens de Kedgwick, Monsieur Basque voudrait plutôt ériger un monument dédié à la résilience des Acadiens. Il oublie qu’il y a jusqu’alors une vingtaine de monuments de l’Odyssée acadienne éparpillés partout qui démontrent la résilience acadienne dès le début de la période post-Déportation.

Qui plus est, monsieur Basque présume que la majorité des historiens – il entend par là les historiens professionnels – ne voient pas dans les intentions britanniques une réelle volonté de faire disparaître physiquement les Acadiens, tandis que monsieur Nicolas Landry croit qu’il n’a jamais été question pour les autorités britanniques de rassembler les Acadiens dans des camps ou de les interner avec l’intention bien arrêtée de les exterminer physiquement. Or, l’histoire nous apprend que dès la Proclamation royale lue par John Winslow, les autorités britanniques avaient un plan bien arrêté de confisquer les biens et les récoltes des Acadiens et, suite à la destruction de leurs titres de propriété, leurs biens meubles et fonciers. Quant à les rassembler, on se rappellera au bas mot, qu’en Angleterre, on les rassembla dans des camps d’internement à Bristol, Liverpool, Falmouth, Penryn, Southampton et Portsmouth et qu’on les embarqua en décembre 1758 dans des vaisseaux en piètres conditions dans la pire période des ouragans où, pour la plupart, ils ont perdu la vie en mer (Duke William, Violet, etc.). Qu’étaient donc, Messieurs Basque et et Landry, les véritables intentions des Britanniques sinon d’exterminer les Acadiens?

Messieurs, serait-ce possible en tant qu’historiens scientifiques de considérer une restitution aux Acadiens pour ces actes génocidaires fomentés et bien arrêtés contre les Acadiens? A titre d’exemple, le gouvernement américain a voté une loi qui vise à appuyer la restitution, par la Pologne, des biens des Juifs en déshérence après l’Holocauste. Cette loi 447 a été votée par le Congrès américain en 2018. Les Juifs demandent 300 milliards de dollars à la Pologne en guise de compensation. On pourrait vous demander de signer une lettre en guise d’appui à cette loi 447. (3) Les Acadiens ne pourraient-ils pas aussi être demandeurs pour les biens en déshérence auprès de la couronne britannique? Les Acadiens n’auraient pas de honte d’inscrire à leur demande des sommes aussi faramineuses que les Juifs.

Au bas mot, il nous reste la problématique de Robert Monckton, parmi les génocidaires des Acadiens surtout pour ce qui est de ses hautes oeuvres le long de la rivière Saint-Jean. À quand le jour où nous libérerons nos étudiants du devoir d’honorer un criminel de guerre à chaque jour pendant la période de leurs études?

Pour ne pas conclure, il est incontournable que la couronne britannique ait procédé au nettoyage ethnique des Acadiens pour s’emparer de leurs terres et de leurs biens afin de les donner aux colons anglais qui ont ensuite été encouragés à venir les remplacer. Le nettoyage ethnique est un acte génocidaire. Bien sûr, ce qui est arrivé aux Juifs et aux Arméniens a été beaucoup plus abominable et dramatique, mais il n’en demeure pas moins que l’intention de Londres était de faire disparaître le peuple acadien. •••

(1) Radio-Canada Ici Nouveau-Brunswick : Puisé éparsement dans le texte de Camille Martel, repris dans l’Acadie Nouvelle, décembre 2018.

(2) Il s’agit de l’article II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée le 9 décembre 1948 et entrée en vigueur le 12 janvier 1951.

(3) Français.rt.com, Manifestation contre la loi 447 à Varsovie : Les organisations juives nous réclament trois cents milliards de dollars. / Agence France-Presse, Le Soleil, le 11 mai 2019.